Critique : Le cochon de Gaza

Une fable humaniste et drôle
Réalisateur Sylvain Estibal
Scénariste Sylvain Estibal
Acteurs Sasson Gabai (l’émouvant La visite de la fanfare), Baya Belal, Myriam Tekaïa, Gassan Abbas
Titre original When Pigs Have Wings
Pays Allemagne, Belgique, France Date de sortie 21 septembre 2011
Genre Comédie Durée 1h39
Après une tempête, Jafaar, un pêcheur palestinien de Gaza, remonte par hasard dans ses filets un cochon tombé d’un cargo. Bien décidé a se débarrasser de cet animal impur, il décide toutefois d’essayer de le vendre afin d’améliorer son existence misérable. Le pauvre Jafaar se lance alors dans un commerce rocambolesque et bien peu recommandable…

 

Dans cette tragi-comédie, l’ensemble du petit peuple de Gaza, coincé entre sa misère absolue au quotidien, les contraintes des militaires Israéliens et le diktat des barbus aux commandes, est représenté par ce pauvre pêcheur dont l’unique souci est de survivre au jour le jour et qui, pour cela, est prêt a tout. Jafaar, dans une permanente dérision de lui-même, même dans les moments tragiques, évolue dans cette histoire a l’humour mordant… et nous laissera espérer que si l’on peut s’entendre, malgré toutes les différences, à l’échelle individuelle, on peut s’entendre in fine, à l’échelle collective.

Alors qu’aujourd’hui, on sera fixé sur le sort de la Palestine, cette semaine a été aussi marquée par ce contexte. Effectivement, c’est le sujet du film du jour : Le cochon de Gaza. Hasard du calendrier ou stratégie marketing tordue ? On ne le saura pas mais point d’épanchement sentimentales ou Intifada pour la fausse suite de Babe. Le cochon de Gaza est une comédie et en plus, plutôt drôle.

Jouant avec délicatesse sur les clichés sans oublier de les affranchir du coup, on ne sera pas jamais gêné comme avec certains films français parlant de ch’ti ou de douane (non, non, je ne vise personne). Le film propose une belle galerie de personnages fortes en gueules et dotés de beaux caractères, toujours aux limites de la caricature donc drôle mais jamais lourd.

Pour ceux qui se demandent comment le réalisateur a-t-il pu tourner un film pareil sans problème. Tout simplement parce que le tournage a eu lieu à Malte et Cologne.

Puis le scénario signé par le réalisateur propose une foule de situations avec un superbe sens de l’absurde et de la dérision dont certaines sont mémorables. Pas le temps de s’ennuyer, le film enchaîne les évènements avec un très bon sens du rythme conforté par une durée parfaite pour le genre (une heure et demie, ni trop long, ni trop court).

Il parcourt l’intégralité de son sujet sans se manquer : la vie pauvre en Palestine, la situation tendue due à la proximité des deux camps, la religion, la guerre et même le terrorisme pourtant tabou dans les comédies. Pas de réflexion politique, pas de parti pris même si le héros est palestinien. Le message sera humaniste : pourquoi se faire la guerre quand on peut cohabiter en paix ? Un cri du cœur du réalisateur visible à la fin du film.

Si le film est aussi réussi, il le doit avant tout au grand talent comique de Sasson Gabai. Marqué par une gueule ornée d’un pif que n’aura pas renié Cyrano, l’acteur est reconnaissable comme un Fernandel ou un De Funès (il suffit de l’avoir vu une fois pour s’en souvenir). La preuve, je ne l’avais vu qu’une seule fois, il y a plusieurs années, sur le génial La visite de la Fanfare où Gabai passait de la comédie au drame avec une aisance digne des grands acteurs. Et pourtant, je l’ai reconnu instantanément. Dans Le cochon de Gaza, il est la star qui magnifie le film. Impossible d’imaginer le long-métrage avec un autre acteur et cela n’est pas donné à tout le monde.

Une fable humaniste, utopique ET drôle portée par l’immense talent de Sasson Gabi.

Une bonne surprise qui vous donnera la banane. On en redemande encore.

Sa scène culte : le message de Jafaar pour revendiquer son attentat.

Note : 7/10

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