Fiche
Titre | The Grandmaster |
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Réalisateur | Wong Kar-Wai |
Scénaristes | Xu Haofeng, Jingzhi Zou, Wong Kar-Wai |
Acteurs | Tony Leung, Zhang Ziyi, Chang Chen, Qingxiang Wang, Tielong Shang, Benshan Zhao, Jin Zhang |
Titre original | Yut doi jung si | Date de sortie | 17 avril 2013 |
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Pays | Hong-Kong, Chine, France | Budget | – |
Genre | Action, Arts Martiaux, Biopic | Durée | 2h02 |
Chine, 1936. Ip Man, maître légendaire de Wing Chun (un des divers styles de kung-fu) et futur mentor de Bruce Lee, mène une vie prospère à Foshan où il partage son temps entre sa famille et les arts-martiaux. C’est à ce moment que le Grand maître Baosen, à la tête de l’Ordre des Arts Martiaux Chinois, cherche son successeur. Pour sa cérémonie d’adieux, il se rend à Foshan, avec sa fille Gong Er, elle-même maître du style Ba Gua et la seule à connaître la figure mortelle des 64 mains. Lors de cette cérémonie, Ip Man affronte les grand maîtres du Sud et fait alors la connaissance de Gong Er en qui il trouve son égal. Très vite l’admiration laisse place au désir et dévoile une histoire d’amour impossible. Peu de temps après, le Grand maître Baosen est assassiné par l’un de ses disciples, puis, entre 1937 et 1945, l’occupation japonaise plonge le pays dans le chaos. Divisions et complots naissent alors au sein des différentes écoles d’arts martiaux, poussant Ip Man et Gong Er à prendre des décisions qui changeront leur vie à jamais… |
Critique
Quand l’artiste Wong Kar-Wai décide de s’attaquer à un mythe des arts martiaux, Ip Man, difficile de ne pas s’exciter. Encore plus quand on sait qu’il s’agit d’une des rares incursions dans le domaine des arts martiaux. Pour parachever le tout, les chiffres faramineux de The Grandmaster donnent le tournis: près de 10 ans pour le réalisateur avant de concrétiser son projet, 360 jours de tournage sur trois ans, Tony Leung qui se brise deux fois le bras durant le tournage, un mois (sept jours sur sept avec des journées de 15 heures) pour le générique du film, 6 mois pour la construction du décor du bordel, le Pavillon d’or, et enfin un mois et deux ans de montage pour la scène de combat entre Tony Leung et Zhang Ziyi. Ça pète plutôt non?
Finalement le résultat à l’écran mitige. Commençons par le commencement. La scène d’ouverture est complètement foirée. Certes c’est très esthétique, cette pluie tombant sur les combattants, la caméra se focalisant sur les vêtements décrivant des courbes dans l’air et brisant net les gouttes d’eau ou sur les pieds frappant sur le sol laissant exploser des gerbes d’eau telles des champignons nucléaires. A force de vouloir privilégier la beauté, Wong Kar-Wai en oublie complètement la bataille là où mon chef d’oeuvre absolu Hero arrivait à concilier les deux. Résultat, une succession de plans sans queue, ni tête finissant par nuire totalement à la fluidité du combat donnant même l’impression de voir la bande annonce du vrai combat.
« Les chiffres faramineux de The Grandmaster donnent le tournis. »
Fort heureusement, les combats suivants seront bien plus réussis et même merveilleux dans le découpage donnant l’impression d’assister à un ballet. Davantage à un ballet qu’à un véritable combat d’ailleurs. Voici donc le deuxième mal du film car les duels à mains nues sont malheureusement désamorcés, toute tension dramatique ayant disparu. Dès lors, nous sommes déçus car The Grandmaster se viande là où on l’attendait le plus. Nous comprenons dès lors que nous ne sommes pas devant un film d’arts martiaux même s’il en est question. Le réalisateur s’intéressant plus à leur philosophie, considérant les arts martiaux comme un art en égal avec le chant ou l’écriture. Un sujet qui aurait pu se révéler des plus passionnants s’il ne regorgeait pas de clichés et de phrases déjà vues ailleurs. Nous n’apprenons rien chez The Grandmaster, pire même on subit un discours rabâchant les mêmes propos, les diluant donc. Puis bon sérieusement, les métaphores, ça va cinq minutes mais sur deux heures…
Pour l’histoire d’Ip Man, vaut mieux rien espérer de la nouvelle association Wong Kar-Wai/Tony Leung, trop bordélique dans sa construction pour offrir une vision limpide de la vie du maître de Bruce Lee, privilégiez plutôt les deux excellents épisodes de l’Ip Man de Wilson Yip (Ip Man et Ip Man 2). Sans compter que le film ajoute des personnages fictifs pour son récit donnant l’impression de naviguer à vue. Finalement, ces personnages surtout celui de Zhang Ziyi finissent par prendre le dessus sur Ip Man à tel point qu’on se demande si nous sommes bien devant un film sur ce dernier. Bon, j’exagère peut-être un peu mais je me suis tout de même dit: « M’enfin, on n’en a rien à taper de celle-là ou de celui-ci, on veut Ip Man surtout qu’il y a beaucoup de choses à dire sur ce dernier, la preuve avec les films de Wilson Yip ». D’ailleurs, le fait que Wong Kar-Wai ait démarré sans scénario est quand même sacrément flippant pour un projet de cette envergure et quand on voit le résultat final… Difficile de lui donner raison.
« Un des acteurs s’est beaucoup entraîné pour les besoins de son rôle. Il est devenu tellement fort qu’il a remporté une compétition nationale. »
De The Grandmaster, on ne retiendra que cette esthétique extrêmement poussée faisant confiner les plans du film à des véritables tableaux. Merci pour l’excellent boulot du chef-opérateur français Philippe Le Sourd parce que sans ça, pas grand-chose à sauver de cette exercice tendancieux mais ratée. D’ailleurs, c’est quoi ces ralentis immondes donnant l’impression que le film saccade tel un vulgaire mkv sur un ordinateur pas assez puissant pour le lire? Un effet immonde qui de plus est répété ici à l’infini. Cette faute de goût m’a vraiment fait décrocher.
Une anecdote qui tue: un des acteurs (Chang Chen pour ne pas le nommer) s’est beaucoup entraîné pour les besoins de son rôle. Il est devenu tellement fort qu’il a remporté une compétition nationale. La classe, non?
Conclusion
The Grandmaster est un film d’arts martiaux sauf qu’il n’en a que les idées. Pas de méchants excitants, pas de combats réellement dramatiques, pas d’enjeux intéressants, juste une succession de plans certes magnifiques mais dénués d’émotions et de fil conducteur. Un voyage dans le vide dont malheureusement on n’en voit jamais le fond… sauf à l’intervention du générique final. |
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+ | – Visuellement, c’est splendide, presque un chef d’oeuvre… | – | – … mais c’est tout. |
3/10 |