Critique : Or Noir

Le film d’aventure à l’ancienne n’est pas mort

 
Fiche

D’après le roman Arab d’Hans Ruesch
Réalisateur Jean-Jacques Annaud (Deux frères, Stalingrad)
Scénaristes Jean-Jacques Annaud, Menno Meyjes (Couvre-feu, La couleur pourpre)
Acteurs Tahar Rahim (Un Prophète), Mark Strong (Green Lantern), Antonio Banderas (La Piel que Habito), Freida Pinto (Les Immortels, Slumdog Millionaire)
Titre original Black Gold
Pays France, Quatar Date de sortie 23 novembre 2011
Genre Aventure, Drame Durée 2h09
Budget 40 000 000 euros
Cette grande fresque épique située dans les années 30 au moment de la découverte du pétrole, raconte la rivalité entre deux émirs d’Arabie et l’ascension d’un jeune Prince dynamique qui va unir les tribus du royaume du désert.

Critique

Jean-Jacques is back ! Et avec lui, il nous amène un film d’aventure comme on n’en fait que trop rarement ces derniers temps. Un film sur le destin d’une famille avec ce qu’il faut comme rebondissements, comme lutte fratricide et par dessus tout, la nature comme témoin imperturbable et impitoyable.

Niveau casting, notre concitoyen Jean-Jacques ne prend aucun risque. Il récupère le plus grand espoir du cinéma français, Tahar Rahim qui enchaîne les films avec une célérité impressionnante (qui l’a oublié dans L’aigle de la neuvième légion où il était méconnaissable). Il prouve ainsi qu’Un Prophète n’était pas seulement une éclaircie. Film après film, on se prend conscience qu’il faudra compter sur lui à l’avenir et vu ce qu’il nous donne dans Or Noir, ce n’est que tant mieux.

Il impressionne dans le nouveau film du réalisateur de L’Ours où il est capable de varier son jeu avec une densité à faire trembler les jambes des plus grands acteurs. J’ai été soufflé par sa capacité à amener à l’écran la métamorphose de son personnage. Enfant naïf et couvé, il se transforme autant corporellement que dans son regard en faisant la guerre. Il n’existe pas plus beau compliment quand on dit que les yeux sont le miroir de l’âme. Beaucoup d’acteurs n’arrivent pas à illustrer la métamorphose via les yeux et abusent à la place de procédés plus ou moins fonctionnels comme des masques de latex et autre.

A ses côtés, les toujours excellents Mark Strong et Antonio Banderas. On pouvait être dubitatif quant à l’idée de les voir incarner des arabes mais force est de constater qu’ils y parviennent aisément et représentent les deux faces d’une pièce, l’un incarnant les traditions et l’autre, la modernité. Une véritable figure paternelle schizophrène.

Et puis encore Freida Pinto qui fait comme Tahar, elle joue partout. Rien que cette année, on l’a vu dans La Planète des singes : Les Origines, Les Immortels et il reste Trishna (déjà sorti outre-Atlantique mais pas de date prévue en France). Elle est fidèle à elle-même, douce et dotée d’une voix sensuelle mais pardi, mange quelque chose.

Là où Or Noir impressionne le plus, c’est dans sa capacité à nous refaire revivre le film d’aventure tel qu’il était à l’époque. Sans effets spéciaux, se reposant essentiellement sur son environnement, ici un magnifique désert et sur un scénario efficace. Les longs plans dans le désert sont à couper le souffle. Les centaines figurants entamant leurs marches, c’est toujours plus impressionnants que des milliers ou de millions de soldats en images de synthèses. Jean-Jacques l’a compris et nous le prouve une bonne fois pour toute.

Les batailles parsemant le film ne transcenderont pas le genre mais demeurent réussies. La plus impressionnante et la plus ingénieuse reste de loin le combat entre le passé (représenté par les soldats) et l’avenir (les tanks).

Le film souffre d’un manque d’originalité si ce n’est son sujet rarement vu au cinéma et basé sur un fait que je ne connaissais pas. : la naissance des riches magnats du pétrole désormais sous les feux du projecteur (qui a dit PSG ?). Mais malgré ce sujet original, le traitement est tout ce qui a de plus classique mais il faut le reconnaître, c’est efficace. Or Noir souffre aussi d’un manque de tension palpable, le héros ne nous semble jamais réellement mal en point (et pourtant, tout ce qu’il traverse est loin d’être une sinécure). Certains parleront à raison, d’un manque d’épique, ce même épique qu’on pouvait voir dans l’autre film parlant de pétrole : There Will Be Blood. Les confrontations entre les différents acteurs ne dégénèrent jamais totalement et ne poussent jamais le vice d’aller plus loin. Hormis un intelligent débat entre les traditionalistes et les « modernes » sur la façon d’interpréter le Coran, il n’y a pas grand chose à se mettre sous la dent.

On pourrait aussi reprocher à la réalisation de Jean-Jacques un poil manque de plans puissants. Ces plans qui vous écrasent sous leur force. Comme la main qui parcourt les épis de blé de Gladiator, la main tendue de Dark Vador vers son fils dans L’empire contre-attaque et des dizaines d’autres. Le genre de plan qui vous font basculer un film dans une autre dimension.

Conclusion

On sort de la projection d’Or Noir ravi avec le sentiment d’avoir vécu un vrai film d’aventure à l’ancienne, un sentiment devenu tellement rare de nos jours. Porté par un bon casting, une belle réalisation et une histoire à multiples rebondissements n’oubliant pas d’entamer quelques réflexions, Or Noir est la bonne surprise du moment. Il souffre juste d’une certaine prévisibilité et n’arrive jamais à se transcender pour confiner aux sommets du genre.
+ – Tahar Rahim
– un film d’aventure à l’ancienne et efficace avec ça
– un sujet innovant
– manque d’épique
– réalisation un poil trop classique
Trophée7/10
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