Critique : Zack Snyder’s Justice League

Le crépuscule de la justice

Fiche

Titre Zack Snyder’s Justice League Titre VO
Réalisateur Zack Snyder Scénariste Chris Terrio
Acteurs Henry Cavill, Ben Affleck, Gal Gadot, Jason Momoa, Ezra Miller, Ray Fisher, Jeremy Irons, Amy Adams, Amber Heard, Jared Leto, Connie Nielson, Robin Wright
Date de sortie18 / 03 / 2021 (VOD) Durée4h 02
GenreAction, Aventure, Fantastique, Science fiction Budget

Après la mort de Clark Kent des mains de Doomsday, Batman réévalue ses méthodes extrêmes et décide de réunir des héros extraordinaires pour former une équipe de combattants afin de défendre la Terre de toutes sortes de menaces. Avec Wonder Woman, Cyborg, The Flash et Aquaman, il affronte Steppenwolf…

Critique

Zack Snyder’s Justice League. Quelle belle histoire. Je ne vais pas revenir sur l’origine du projet entre le tragique suicide de la fille du réalisateur (Autumn dont un hommage est posé au générique de fin), du guet-apens sur Joss Whedon, la sortie d’une version bâtarde au cinéma et le hastag #ReleaseTheSnyderCut.

Juste sur sa fin. La Warner cherchant un moyen de faire le buzz autour de sa plate-forme de streaming peinant à convaincre, ils ont été ingénieux pour le coup en sortant de leur panier une idée géniale et surtout inattendu. Donner « presque » carte blanche à Zack Snyder pour qu’il termine sa Justice League avortée. Afin de s’assurer d’avoir la main sur toutes les décisions créatives, ce dernier a refusé d’être payé. Petit détail non négligeable, il n’a jamais vu la version sortie au cinéma sur les conseils de sa femme et de son ami Christopher Nolan. Ces derniers voulaient l’empêcher d’avoir le cœur (encore) brisé.

Pour l’anecdote, ce n’est pas la première fois que la Warner sort une version director’s cut sous la pression du public. Ils ont dû en faire de même pour un autre film. Encore un DC. En l’occurrence Superman II. À l’époque, Richard Donner avait été éjecté pour être remplacé par un autre Richard, Lester. Bref, finalement, cette version est sortie en novembre 2006, soit 26 ans plus tard.

Quels changements ?

Heureusement, on n’aura pas à attendre aussi longtemps. Seulement, un peu plus de trois ans. Toutefois, la grosse question. Concrètement, qu’est-ce que Zack Snyder a fait ? Grosso modo, il a repris les scènes déjà tournées avant son éviction. Seulement cinq minutes supplémentaires ont été filmées pour l’occasion. Le tout avec 2 000 plans d’effets spéciaux à finaliser.

Et les différences par rapport à la version en 2017 ? Mis à part le troisième acte, les modifications me font surtout penser à une version longue. Une version TRÈS longue même. On double quand même la durée. On échappe également à l’horrible effacement de la moustache de Superman.

Dès lors, trois personnages sont approfondis. Flash, qui a droit à sa scène avec Iris, Steppenwolf et surtout Cyborg qui a carrément une origin story. Darkseid apparaît également. Tout comme Zeus, en sosie du Leonidas de 300, et un invité surprise. Le climax a également été pas mal modifié avec l’ajout d’une scène plutôt cool même si sortant de nulle part. Pour couronner le tout, une dernière scène géniale dans le monde Knightmare. Je crois même bien que cette dernière est ma préférée.

Pauvre Whedon

Avant d’attaquer à ma critique de cette Snyder Cut, juste un petit mot concernant Joss Whedon. Je sais que c’est la mode de le défoncer, mais bordel, quand tu vois cette Snyder Cut, tu te dis que c’est surtout la Warner à blâmer. Le studio s’est complètement planté. Dans les grandes largeurs. Jamais, mais jamais, le scénario de Chris Terrio n’aurait dû être validé.

T’imagines un peu. T’es à la place de Joss Whedon. Tu sors d’un burn-out après avoir aligné deux Avengers et supervisé le MCU. On t’embauche pour faire un petit film DC, Batgirl. Finalement, on te demande de l’aide en urgence pour reprendre un long-métrage presque terminé suite aux problèmes perso de ton collègue.

Au bout du compte, tu te retrouves devant des rushs et un scénario impossible à adapter pour une durée de deux heures sans passer par un gros charcutage. Sans oublier, le fait que l’univers et le style ne sont pas les mêmes que les tiens. Par contre, je tiens à le préciser. Joss Whedon a pas mal baissé dans mon estime suite aux histoires de harcèlement remontées par Ray Fisher et certaines actrices. Je ne veux pas juger trop vite, mais ça commence à faire beaucoup de casseroles. Bref, il n’est pas étonnant que cette histoire ait mal fini.

Même défauts, même qualités

Revenons maintenant à la Snyder Cut. Je vais le dire directement. Je n’ai apprécié que moyennement. Tout d’abord, c’est beaucoup trop long pour ce qu’il a à raconter. Plusieurs fois, j’ai failli piquer du nez. Du coup, j’ai dû le regarder en deux fois. Autre point ne m’ayant pas plu. L’histoire. Au final, elle est quasiment identique. Elle est juste davantage approfondie. Logique avec autant de temps disponible. Du coup, n’ayant pas aimé la version d’origine, c’était agaçant de me retaper le même déroulement mais en plus long.

Surtout, on retrouve les mêmes défauts. Un méchant très sommaire. Heureusement, il a retrouvé son look d’origine donc demeure légèrement plus badass sans être suffisamment convaincant. Une dynamique de groupe ne fonctionnant tout pas. Principalement, noyée par des échanges navrants. La problématique d’avoir des origin stories (celles de Flash, Aquaman dans une moindre mesure, Cyborg et Steppenworlf – ça commence à faire beaucoup) au sein d’un crossover pétant le rythme.

Les qualités sont également les mêmes à mes yeux. À savoir l’introduction de l’Amazone (par contre, celle excellente du chevalier noir est passée à la trappe car elle est de Whedon), sa technique pour protéger les civils avec le bracelet, j’ai kiffé, et surtout le passage de la résurrection de Superman. Non seulement, il donne naissance au truc le plus cool du film (le plan où l’homme d’acier arrive à suivre les mouvements de Flash pourtant dans la Force Véloce, je l’adore) mais elle provoque également des émotions (les retrouvailles avec Martha). Des émotions désespérément absentes du reste du long-métrage. Je note également des tentatives d’humour toujours ratées, mais à part le « Je suis riche » de Batman.

D’autres défauts, d’autres qualités

Le seul apport que j’ai vraiment apprécié concerne l’épilogue, plus précisément la scène dans le Knightmare’s world avec cet échange fun entre Batman et le Joker (Jared Leto au top). C’est ce type d’échange qui manque au sein de l’équipe des justiciers. Arthur (Curry, pas Fleck hein) tente bien de sortir la carte (le joker ?) de la provocation, mais ça ne fonctionne pas. Tandis que Flash passe trop pour le bouffon de service. Il est amusant de constater qu’Aquaman passe désormais mieux chez moi par rapport à 2017. La différence ? Il a eu son histoire solo, permettant de m’y attacher.

Quoiqu’il en soit, on est du pur Zack Snyder. Là, il n’y a pas tromperie sur la marchandise. Le réalisateur atypique a posé sa patte partout. Jusqu’à provoquer une overdose chez moi. J’adorais le réalisateur durant mon adolescence. Il m’avait marqué avec son style clippesque. Maintenant, je suis plus vieux. Son style, je n’en peux plus. Ça m’est devenu vraiment écœurant. Les ralentis sont cools, mais il s’agit, à la manière des jump scares, de les utiliser avec parcimonie afin de renforcer leurs impacts. Sauf que là, il y en a partout. Dans tous les sens. Le film entier est un clip en fait. Tu le passes en mode lecture normale. Tu gagnes une heure.

Un film ne peut pas être un clip géant

Ce qui est cool dans un clip peut devenir ridicule dans un film. C’est bien mon gros problème avec Zack Snyder’s Justice League. Il y a tellement de comportements là pour faire cool au dépit de la crédibilité. Un exemple ? La première rencontre entre Batman et Aquaman. Ce dernier laisse Bruce Wayne au bord de l’eau en compagnie de villageois. Quand Aquaman se casse, t’as les villageois qui commencent à chanter. J’ai littéralement explosé de rire. On est dans une comédie musicale ou quoi ? Je me suis cru devant l’introduction de la version des Misérables avec Hugh Jackman.

Toujours avec Aquaman, t’as une autre scène où il se déshabille avant de plonger dans l’eau. On se croirait devant une publicité pour DOP. On pourrait également citer cette longue séquence au ralenti avec Lois Lane allant acheter un café. Il y a tellement d’exemples, mais l’idée est passée.

Néanmoins, il faut reconnaître que certaines images sont magnifiques. Le mec a un talent pur pour te sortir des plans à tomber par terre. Malheureusement, c’est trop inégal. T’en as certains, wow. T’en as d’autres, beurk. Les montagnes russes, quoi. À mon avis, le principal problème, c’est l’omniprésence de fonds verts donnant l’impression d’avoir un film totalement tourné dans un studio. C’est d’autant plus rageant que la première partie envoie du rêve avec des décors naturels à couper le souffle (j’étais en mode Seigneur des Anneaux pour tout dire). Si tout Justice League avait été comme ça, on aurait eu une bombe atomique.

Attention, à partir de maintenant, ça spoile un peu.

Darkseid, la déception ultime

J’ai été déçu du traitement de Darkseid. Je m’attendais pas à un gros rôle. Donc de ce côté, ça va. Mais, qu’est-ce qu’il est moche ! On dirait un personnage sorti d’une cinématique de PlayStation 2. Je comprends mieux pourquoi il a été éjecté de la version cinéma. Il fallait clairement le rebosser. Et pas qu’un peu.

De Darkseid, finalement, il n’y aura qu’une scène notable à se mettre sous la dent. Le flash-back déjà vu au cinéma. À l’exception près que Léonidas, pardon Zeus, s’amuse beaucoup. Encore une fois, j’ai explosé de rire. Passons les images de synthèse ratées pour se concentrer sur la fin de la séquence. Mais bordel, ils ont carrément repris le truc de Thor dans Avengers : Infinity War. Franchement, mais franchement, si tu as vu le film, regarde-moi dans les yeux et dis-moi que tu n’as pas pensé à : « Il aurait dû viser la tête, ce con. » quand la hache a fini son chemin sur l’épaule droite du dirigeant d’Apokolips ? Aussi, je trouve que c’est un peu con d’introduire le grand vilain de l’univers DC en lui infligeant une défaite d’entrée. On lui coupe l’herbe sous le pied. Le pauvre, déjà qu’il doit se taper une modélisation bas de gamme…

Dans le même style, il y a un certain membre ultra-connu de la Justice League. Je l’adore dans les comics, mais là… Beurk… De plus, ça se fait au dépit de la vraisemblance.

Pour introduire Flash, on a également une scène « badass » avec démonstration de ses pouvoirs. Je mets des guillemets, parce que je l’ai également trouvé un peu chelou. L’effet est cool, mais le coup du « je caresse la fille ni vu, ni connnu ». C’est digne d’un #MeToo. Le mec est beau gosse, ça passe. Mais ça aurait été un Cyprien… En plus, il en rajoute par la suite en demandant s’il y a moyen avec Diana…

Un ratio symbolique

Dernier point et après, j’arrête parce que là, ça commence à faire beaucoup. Le format. Je suis mitigé. D’un côté, c’est couillu. De l’autre, ça fait petit sur mon écran 16/9. L’effet aurait été beaucoup plus impressionnant si l’image avait pris toute la taille de l’écran. C’est un peu une décision prise pour sortir du lot en dépit du bon sens. Dans une salle de cinéma IMAX, je dis oui. Mille fois, oui. Mais là… En fait, ça symbolise bien le problème Snyder à mes yeux. Le mec mise tout sur l’autel du cool, quitte à envoyer la logique dans les abysses façon « This is Sparta ! ». Il en fait beaucoup trop pour sortir du lot au point que ça devient parfois gênant. Comme l’ado faisant des tentatives capillaires. Bref, la subtilité n’est pas son fort.

Je suis encore plus agacé car je l’ai littéralement adoré, voir même idôlatré, à une époque. L’armée des morts, 300, Watchmen et Le royaume de Ga’Hoole sont des films que j’apprécie énormément. De temps en temps, je me les refais. En tout cas, j’espère sincèrement qu’il en a fini avec DC pour se concentrer sur des projets où il pourra enfin se lâcher.

Pauvre cyborg

Bordel, avec tout ça, j’ai failli oublier de parler du personnage qui a le plus bénéficié du label Snyder Cut : Cyborg. Quand j’ai terminé ma séance, j’ai clairement compris pourquoi Ray Fisher était dégoûté. Non seulement, on l’éjecte du film, mais en plus, on lui annule son film solo par la suite.

En toute franchise, je comprends la décision des producteurs. Déjà, dans Justice League, il a carrément son film solo. Mais en plus, il n’est aucunement mémorable. Il boude tout le temps. Son background n’est pas intéressant. Pour couronner le tout, son costume passe moyen. Le corps fait fake tandis que la tête fait cheap. Le seul truc que j’ai aimé, c’est la vision de son corps en charpie après l’accident. C’était glauque et terrifiant. Après, RoboCop est passé par là quand même.

Par heureux que Snyder puisse tourner la page.

Conclusion

Comme disait un grand philosophe, je ne m’attendais à rien, mais je suis quand même déçu. J’ai tout fait pour ne pas m’emballer sur cette Snyder Cut de Justice League afin de m’assurer une belle surprise. J’ai tout foiré en m’enthousiasmant à mort avec ces quinze premières minutes épiques. Puis la déception. On retrouve tous les défauts inhérents au style Snyder : abus des ralentis même quand ça ne s’y prête pas, volonté de proposer des plans iconiques plutôt qu’une bonne histoire, effets spéciaux trop ambitieux donc à la ramasse, humour raté et succession de punchlines foireuses. Le tout accentué par une durée beaucoup trop longue. Heureusement, ça reste un Snyder et par moments, il arrive à proposer du spectacle épique comme nul autre. Bref, vivement son retour vers des projets moins ambitieux. À commencer chez Netflix.

+

  • Zack Snyder peut enfin livrer sa vision
  • Quinze premières minutes épiques
  • Séquence Knightmare
  • Certains plans sont beaux à tomber par terre
  • Résurrection de Superman

  • Beaucoup trop long
  • Surutilisation de ralentis
  • La recherche du plan stylé prend le pas sur la crédibilité
  • Flash est assez chelou
  • Darseid (et l’invité surprise) sont immondes
  • Images de synthèse pas au niveau
  • Foutre l’origin story de Cyborg en plein milieu d’un crossover
  • Dynamique de groupe foirée
  • Format de l’image sur une télé 16/9
  • Intrigue inintéressante
  • Humour constant dans le flop
5/10
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