Critique : Touristes

God Bless England

Fiche

Titre Touristes
Réalisateur Ben Wheatley
Scénaristes Alice Lowe, Steve Oram et avec la participation d’Amy Jump
Acteurs Alice Lowe, Steve Oram, Sara Stewart, Tony Way, Lucy Russell, Jonathan Aris, Richard Lumsden, Monica Dolan
Titre original Sightseers Date de sortie 26 décembre 2012
Pays UK Budget
Genre Comédie Durée 1h29

Tina a toujours mené une vie paisible et bien rangée, protégée par une mère possessive et très envahissante. Pour leurs premières vacances en amoureux, Chris décide de lui faire découvrir l’Angleterre à bord de sa caravane. Un vrai dépaysement pour Tina. Mais très vite, ces « vacances de rêve » dégénèrent: touristes négligents, ados bruyants et campings réservés vont rapidement mettre en pièces le rêve de Chris et de tous ceux qui se trouveront sur son chemin…

Critique

Avant d’être le nouveau film de Ben Wheatley, Touristes est surtout le bébé d’Alice Lowe et Steve Oram, scénaristes et aussi alter-égos de Tina et Chris. Deux personnages qu’ils ont mis des années à mettre au point via le théâtre et sur un pilote finalement avorté car jugé trop lugubre par les studios. Finalement, ce projet s’est monté après que l’actrice ait envoyé le lien du pilote, mis à disposition sur le net, à Edgar Wright avec qui elle a travaillé sur Hot Fuzz. La suite, vous la connaissez, Ben Wheatley pas encore auréolé par son succès sur Kill List est arrivé sur le projet et ça a donné ce bonbon bizarre.

Le résultat est une pâtisserie dont on reconnait aisément la touche de Ben Wheatley surtout pour le côté mystique. Il en résulte un road-movie héritier de Bonnie et Clyde et consorts mais sur fond de décors de l’Angleterre du nord. Le voyage nous est présenté lors du générique et traverse des lieux assez atypiques comme le musée des tramways ou encore le musée des crayons avec comme fil rouge des campings où se bagarre la pluie, la boue et la brume. Un road movie qui change beaucoup du désert et du bitume du grand Ouest.

Touristes en lui-même est un mélange de comédie et de films de serial-killer donc détracteurs d’humour noir, fuyez. Les personnages collectionnent les visites des musées et les meurtres sans que la culpabilité ne les ronge. Un cocktail détonnant donc même si la sauce met un peu de temps à prendre. On peut penser au récent God Bless America (d’où le titre racoleur de mon article) sur un sujet quasiment similaire à la différence qu’on lorgne ici sur l’humour britannique dont ce flegme et ce pince-sans-rire inégalables sont les représentants.

Malgré tout, un tel sujet basé sur deux psychopathes est dangereux car difficile de s’intéresser à la suite si on ne s’attache pas aux personnages. Heureusement, Alice Lowe et Steve Oram sont suffisamment solides pour offrir un couple complètement décalés, blindés de fêlures mais finalement attachants. Ainsi le suppositoire « meurtre » est plus facile à insérer car le lubrifiant « comédie satirique » a effectué son boulot. D’ailleurs, l’actrice a partagé dans une interview qu’ils avaient tous les deux fait des recherches sur les tueurs en série à tel point que l’actrice aime se considérer comme l’équivalent de Morgan Freeman dans Le Collectionneur.

D’ailleurs l’actrice y est pour beaucoup dans l’implication émotionnelle du film en composant un personnage tellement barge qu’il en devient flippant car complètement imprévisible. Une performance noyant quasiment celle de son partenaire à l’écran pourtant c’est lui qui commet les premiers meurtres avec une dextérité égale à celle de ses collègues d’outre-Atlantique. En même temps, les anglais n’ont rien à prouver dans ce domaine grâce à leur champion Jack l’Éventreur. D’ailleurs en parlant de meurtres, ceux de Touristes font froid au dos grâce à un réalisme très poussé. Les cadavres provoquent la fascination par l’excellence des effets, mention spéciale au mec aplati par la caravane. Une suite finalement logique de Kill List où se faisait le même constat.

La réalisation de Ben Wheatley est impeccable, capable de retranscrire une sorte de cadre éthérée, presque mystique pour ce voyage hors commun se finissant sur un twist dingue. En même temps, le talent du bonhomme n’est plus à démontrer après son Kill List. Pour conclure, abordons le mignon petit-petit-petit-petit fillot d’Idéfix, personnage à part entière du film au même titre qu’Uggie, le pote de Dujardin dans The Artist. Sa bouille est la touche mignonne du film permettant de souffler un peu entre chaque horreur des deux monstres.

Conclusion

Touristes joue beaucoup par le côté décalé de ses situations où les visites et les meurtres s’enchainent dans la même impassibilité. Il bénéficie aussi de ses deux personnages bigarrés et d’un cadre original (le nord de l’Angleterre).

+ – Le réalisme des meurtres
– Le côté décalé
– Alice Lowe
– Réalisation
– Il faut apprécier ce genre d’humour (moi-même, j’ai un peu de mal)
6/10
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