Critique épicée : Skyfall

The Skyfall Rises of the Deathly Hallows

Fiche

23ème épisode de la saga James Bond (créé par Ian Fleming)
Titre Skyfall
Réalisateur Sam Mendes
Scénaristes Neal Purvis, Robert Wade, John Logan, Patrick Marber
Acteurs Daniel Craig, Judi Dench, Naomie Harris, Ralph Fiennes, Javier Bardem, Ben Whishaw, Bérénice Marlohe, Helen McCrory, Rory Kinnear, Albert Finney
Titre original Date de sortie 26 octobre 2012
Pays USA, UK Budget 200 000 000$
Genre Action, Aventure, Espionnage, Thriller Durée 2h25
Lorsque la dernière mission de Bond tourne mal, plusieurs agents infiltrés se retrouvent exposés dans le monde entier. Le MI6 est attaqué, et M est obligée de relocaliser l’Agence. Ces événements ébranlent son autorité, et elle est remise en cause par Mallory, le nouveau président de l’ISC, le comité chargé du renseignement et de la sécurité. Le MI6 est à présent sous le coup d’une double menace, intérieure et extérieure. Il ne reste à M qu’un seul allié de confiance vers qui se tourner : Bond. Plus que jamais, 007 va devoir agir dans l’ombre. Avec l’aide d’Eve, un agent de terrain, il se lance sur la piste du mystérieux Silva, dont il doit identifier coûte que coûte l’objectif secret et mortel…

Critique

Avec un changement d’interprète et de ton, Casino Royale avait redonné un bon coup de fouet à la franchise du plus célèbre des espions anglais. Moins de gadgets et plus de réalisme, ce nouveau Bond renouait avec le personnage créé par Ian Flemming. Ce qui a fait le bonheur des uns (« Daniel cartonne, le vrai James Bond, c’est LUI ! ») mais aussi le malheur des autres (« J’en veux pas de l’ersatz blondinet de Jason Bourne, rendez moi Piiiiiiiierce/Seeeeean/etc. !!! »). La suite, Quantum of Solace, n’était malheureusement pas du même niveau. Sous l’ère Craig, il y a donc du très bon comme du moins bon. Qu’en est-il de ce troisième opus ?

Un aspect qui m’a frappé dans Skyfall, c’est sa très (trop?) forte inspiration du travail de Christopher Nolan sur les Batman.

Un James Bond qui montre ses limites physiques (les tests qu’il passe au MI-6 ainsi que la scène où il s’accroche à l’ascenseur) mettant en perspective l’homme et la légende qu’il incarne, thème abordé dans The Dark Knight Rises. Les plans nocturnes et aériens de Shanghai rappellent ceux de Hong-Kong dans The Dark Knight. Silva, le bad guy, renvoie au Joker. Outre le fait qu’il est le Némésis de 007, il incarne une menace sourde et invisible pouvant frapper n’importe où et n’importe quand. Il s’amuse à semer le chaos et à intimider les forces de l’ordre via des supports de communication (les ppt « Think on your sins » remplaçant la vidéo du Joker qui assassine un flic).

« Les Batman de Nolan représentent un solide matériel d’inspiration. Mais à ce niveau, ça tient plus du repompage. »

Spoiler

Il se laisse volontairement capturer et enfermer avec une évasion planifiée. Il se déguise en policier entouré de complices eux-mêmes déguisés en flics. Pour tenter d’assassiner M, figure symbolique, aux yeux de tous dans un tribunal (Le Joker en faisait de même avec le Maire de Gotham en plein air). Mallhory se prend alors une balle pour protéger M, au même titre que le commissaire Gordon pour protéger le Maire. Suite à cet acte de bravoure, Mallhory et Gordon sont tous deux promus. La capsule de cyanure qui est restée sur la digestion de Silva en a fait un cousin éloigné de Double-Face. Comme Bruce Wayne, James Bond est orphelin. Puis y’a un vieux qui garde le manoir familial. Comme dans Batman Begins, il brûle à la fin. Le manoir, pas le vieux.

Dans une moindre mesure, j’ai même pensé à Harry Potter durant le final. Le vieux garde-chasse m’a rappelé une sorte d’Hagrid avec sa gueule hirsute et son crockdur. Pendant le plan de James qui se regarde devant un miroir, je m’attendais presque à voir ses parents derrière lui dans le reflet. Et le passage secret par lequel la joyeuse bande s’enfuit se serait trouvé derrière le portrait de la Grosse Dame que je n’en aurais pas été étonné. Un peu tiré par les cheveux, j’en conviens, mais c’est ma critique donc d’une certaine manière, je dis ce que je veux.

Et en bonus dans la catégorie hommage au 7ème Art, Silva balance une réplique clin d’œil au « Say hello to my little friend » de Scarface pendant l’assaut du manoir.

Au-delà de ces hommages/inspirations, le film souffre de quelques points négatifs. L’enjeu pseudo-dramatique de la divulgation hebdomadaire d’une liste d’agents alimente le début du film mais passe complètement à la trappe par la suite. De plus, mettre en péril la vie d’agents n’est pas forcément le meilleur moyen d’affaiblir M (elle n’hésite pas à risquer la vie de son chouchou de Bond…). Et avec ça, Silva n’apparaît qu’à la moitié du film, est trop peu présent et m’a plus amusé que fait flipper. Il en résulte que la menace qu’il est sensée incarner ne m’a pas prise aux tripes. D’autre part, la James Bond girl campée par Bérénice Marlohe est fade, vulgaire et sa main qui tient une clope s’agite soudainement en mode Parkinson quand il s’agit de jouer la peur. Mouais, on repassera pour la finesse. Je déplore aussi quelques choix stratégiques étranges dans ce film :

Spoiler

Ne pas fouiller Bond et donc manquer de découvrir sa radio miniature à l’arrivée sur l’île de Hashima. Silva se ramène dans un tribunal en plein cœur de Londres pour assassiner frontalement M (y’a plus subtile comme approche. Il ne se dit pas qu’elle sera un peu entourée et protégée ? Génie va !). Bond et M vont délibérément s’enfermer dans un Manoir en n’étant que peu armés face à des mercenaires.

« Mais Skyfall, bien qu’inférieur à Casino Royale, est doté de solides arguments qui sont vraiment la bienvenue après un Quantum of Solace en demi-teinte. »

La scène d’ouverture contient ce que j’attends d’un début de James Bond, à savoir de l’action propre, dynamique et spectaculaire. Le tout est filmé de manière lisible et non avec un surdécoupage hystérique comme sur le film précédent. S’en suit un bon générique, tant sur le plan graphique que musical. Le film renoue avec les origines de la saga en les modernisant par moments (Q est maintenant un p’tit jeune, M est de nouveau un mec mais Moneypenny est black, la reprise en douceur des gadgets, clins d’œil à plusieurs épisodes précédents (l’évocation du stylo explosif de Goldeneye, « For your eyes only » calé dans une réplique, l’Aston Martin DB5, etc.) tout en conservant le style, plus brutal et plus humain (l’aspect introspectif du film aidant), introduit par Daniel Craig. Skyfall conjugue donc intelligemment l’ancien et le moderne. Le jeu de Javier Bardem est excellent, très drôle par moments. Un des points forts indiscutables du film est clairement la photographie qui est belle à en chialer. Les plans ultra-léchés sont légions, variés et vraiment mémorables : la baston dans l’immeuble de verre à Shanghai en plan-séquence avec un léger zoom et en ombres chinoises, l’arrivée en pirogue au casino de Macao, les plaines écossaises embrumées, l’assaut final nocturne dans les flammes, etc.

Sinon y’a un scorpion. Et des dragons de Komodo.

Conclusion

Un James Bond de qualité et agréable à suivre, servi par une magnifique photographie et une bonne interprétation d’ensemble. Skyfall manque toutefois d’action et d’inspiration.
+ – La scène d’ouverture
– La chanson d’Adèle
– La photographie de Roger Deakins
– Les clins d’œil hommages
– Daniel Craig
– Bonne performance de Javier Bardem…
– …pour un méchant finalement peu convainquant
– James Bond girl insipide
– Manque de scènes spectaculaires
– Trop inspiré de la trilogie Batman de Nolan
7/10
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