Critique : Gravity

Dans l’espace, il y a du barouf

Fiche

Titre Gravity
Réalisateur Alfonso Cuarón
Scénaristes Alfonso Cuarón, Jonás Cuarón
Acteurs Sandra Bullock, George Clooney, Ed Harris
Titre original Date de sortie 23 octobre 2013
Pays États-Unis, Royaume-Uni Budget 100 000 000 $
Genre Action, Science fiction Durée 1h 30

Pour sa première expédition à bord d’une navette spatiale, le docteur Ryan Stone, brillante experte en ingénierie médicale, accompagne l’astronaute chevronné Matt Kowalsky. Mais alors qu’il s’agit apparemment d’une banale sortie dans l’espace, une catastrophe se produit. Lorsque la navette est pulvérisée, Stone et Kowalsky se retrouvent totalement seuls, livrés à eux-mêmes dans l’univers. Le silence assourdissant autour d’eux leur indique qu’ils ont perdu tout contact avec la Terre – et la moindre chance d’être sauvés. Peu à peu, ils cèdent à la panique, d’autant plus qu’à chaque respiration, ils consomment un peu plus les quelques réserves d’oxygène qu’il leur reste. Mais c’est peut-être en s’enfonçant plus loin encore dans l’immensité terrifiante de l’espace qu’ils trouveront le moyen de rentrer sur Terre..

Critique

Vendu comme le film de l’année, voire le film des dix ans à venir, voire même du siècle (là, les mecs s’enflamment un peu), Gravity marque surtout le retour du génie Alfonso Cuarón, sept ans après son chef d’œuvre, Les Fils de l’homme.

Évidemment, un tel long-métrage ne peut que décevoir. Trop médiatisé, trop vendu, trop crié au chef d’œuvre et à force de crier au loup, ça fait trop de trop et provoque une attente démesurée. Gravity fait partie de ces longs-métrages peoples comme il en arrive qu’un par an, à l’instar de Drive en 2011. Pour ma part, Gravity est loin d’être le chef d’œuvre annoncé, car ses défauts sont assez lourds. Je vais tenter de les analyser, mais attention, je ne ferais pas une critique acerbe pour tenter d’aller à contre-courant. Je vais essayer au contraire de vraiment vous faire part des choses qui m’ont dérangé.

Gravity fait partie de ces longs-métrages peoples comme il en arrive qu’un par an.

Tout d’abord commençons par LA grosse claque de Gravity : la réalisation. Alfonso Cuarón avait déjà marqué ses collègues et ses spectateurs sur Les Fils de l’homme avec son plan-séquence de folie où Clive Owen se frayait un chemin dans une bataille mémorable. Dans Gravity, il fait encore plus fort ! Il frappe tellement fort que la plupart de ses collègues ont dû faire dans leur froc en voyant ce Mexicain acquérir au moins cinq à dix ans d’avance sur eux en terme de réalisation. Ce n’est pas pour rien que l’un des plus estimés d’entre eux, James Cameron, a adoubé Gravity. Il ne pouvait en être autrement et c’est bien, ça va faire de la concurrence saine.

Chaque plan, chaque séquence, chaque scène d’action, tout est l’objet d’une telle maestria. L’objet d’un maître. J’ai été soufflé par la puissance des plans se déroulant dans l’espace. Jamais (dans mes souvenirs) un film n’a été aussi beau (y avait bien Space Cowboys, mais ça reste anecdotique). Il est difficile de trouver les mots pour définir la puissance des plans. La preuve, j’ai du mal à trouver sans faire dans le classique : puissant, bluffant, vertigineux, sublime et leurs synonymes. Le réalisateur en profite aussi pour bouleverser les lois cinématographiques en ajoutant des passages en vue subjective (le film Doom à la poubelle). Sûrement les meilleures séquences du film car mêlées à la 3D, elles donnent un sentiment d’immersion presque inégalée au cinéma (toutefois, les jeux vidéo ont de l’avance sur ce point, voir Beyond : Two Souls).

Pour faire simple, Gravity marque l’histoire du cinéma du point de vue technique. Il y aura bien un avant et un après.

Au niveau des scènes d’action, j’en ai pris plein la gueule. Gravity accumule les moments de bravoure. Probablement un des films les plus spectaculaires qui existent. Un véritable grand huit pendant une heure et demie non-stop. Après avoir vu le film, je me suis dit : « C’est sûr que je vais acheter le blu-ray 3D pour pouvoir revoir ça et ça et ça et puis ça aussi! ». Sûrement, un film qui peut se revoir à l’infini.

Gravity marque l’histoire du cinéma du point de vue technique. Il y aura bien un avant et un après.

Mais… Le fameux mais ! Mais narrativement parlant, j’ai trouvé ça plutôt faible. Je n’ai pas du tout réussi à accrocher au personnage de Sandra Bullock, le docteur Ryan Stone. Pourquoi ? Difficile à dire, peut-être parce qu’il n’y a pas eu de scène d’exposition ? On est direct lancé dans le bain d’où l’intéressante parallèle entre Gravity et une attraction à la Space Moutain. Peut-être, mais pas seulement. En fait, j’ai trouvé ça un peu éculé, l’histoire de cette femme meurtrie qui tente de redonner un sens à sa vie dans l’espace. L’intrigue est rarement surprenante.

Aussi, malgré toute la beauté du film et un endroit rarement utilisé au cinéma, Gravity n’est qu’un survival en milieu inhumain. Une sorte d’Open Water transposé dans l’espace. Il en récupère même toutes les ficelles scénaristiques et en ce point, il n’innove en rien. Le film aurait-il autant de succès s’il ne s’était pas déroulé dans l’espace et ne bénéficiait pas d’une réalisation hors du commun. Permettez-moi d’en douter.

Malgré toute ma sympathie pour l’actrice Sandra Bullock, je n’ai ressenti d’attachement pour son personnage. À vrai dire, qu’elle meurt ou non, je m’en fichais un peu. Tout ce qui m’intéressait, c’est d’en prendre plein la gueule. Ah voilà, peut-être le point qui explique pourquoi je n’ai pas réussi à plonger dans l’histoire. J’étais tellement focalisé sur la magnificence technique de Gravity que j’ai totalement décroché de l’intrigue. Mon esprit était bien plus focalisé sur les « oh putain, comment ils ont réussi à faire ça » ou autre « mais comment c’est bien pensé, ce plan » au lieu de m’interroger sur le sort de Ryan. À en faire trop d’un point de vue technique, Alfonso Cuarón m’a fait sortir de son histoire et a annihilé toutes mes synapses empathiques (et pourtant, mes lecteurs les plus assidus savent que je ne suis pas bien compliqué à toucher). Peut-être qu’un deuxième visionnage résoudrait ça.

De plus, je n’ai pas ressenti ce sentiment de claustrophobie dans l’espace. La proximité des stations était telle que pas un moment, je n’ai été angoissé par cette perspective de dériver sans fin dans l’espace. Alien, le huitième passager reste pour moi le modèle du genre. Je pense que c’est dû au fait que tout va trop vite, tout bouge trop, donc on n’a pas le temps de ressentir l’immensité du vide et l’angoisse qui en découle. Au moment où Ryan se retrouve bloquée, là où on devrait se dire « mais elle est foutue, elle ne pourra jamais s’en sortir » et voilà qu’un évènement incongru fait qu’elle réussit à franchir une nouvelle étape vers son but.

Je n’ai pas ressenti ce sentiment de claustrophobie dans l’espace.

À noter aussi des ficelles scénaristiques me semblant un peu « faciles » nuisant légèrement à la sensation de réalisme. Après comme je ne suis pas un expert, je ne veux pas juger. Toujours cette histoire des stations à proximité.

Ah oui, j’ai pas mal pensé au jeu vidéo Uncharted. En voyant Sandra s’en prendre plein la gueule tout en essayant de se frayer un chemin parmi les débris à l’aide de mouvements atypiques, j’ai eu des flashs de Nathan essayant de grimper sur la paroi d’un train sur le point de tomber dans le vide ou de sortir rapidement d’un paquebot au destin similaire à celui du Titanic.

Conclusion

Gravity était la promesse d’un huis clos angoissant dans l’espace mettant en exergue toute la claustrophobie et la peur de la solitude enfouies en nous. Je n’en ai pas vu la couleur. Par contre, j’ai vu une date majeure dans l’histoire du cinéma au niveau de la réalisation. Du jamais-vu ! Une prouesse technique bluffante, mais pas un grand film.

+ – La réalisation, un Oscar direct !
– Les effets spéciaux
– La simulation de l’espace
– La 3D
– Les scènes d’action
– Histoire moyenne
– Des personnages pas vraiment attachants
– Pas de sentiment de claustrophobie
Trophée8/10
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