Critique : Black Panther : Wakanda Forever

Un sublime hommage noyé

Fiche

Titre Black Panther : Wakanda Forever Titre VO
Réalisateur Ryan Coogler Scénaristes Ryan Coogler & Joe Robert Cole
Acteurs Letitia Wright, Lupita Nyong’o, Danai Gurira, Winston Duke, Angela Bassett, Tenoch Huerta, Martin Freeman, Dominique Thorne, Florence Kasumba, Michaela Coel, Alex Livinalli, Mabel Cadena
Date de sortie09 / 11 / 2022 Durée2h 41
GenreAction, Aventure, Drame, Fantastique, Science-fiction, Thriller Budget200 000 000 $

Une suite qui continuera d’explorer le monde sans pareil de Wakanda et tous les personnages riches et variés présentés dans le film 2018.

Critique

Black Panther : Wakanda Forever arrive dans les salles précédé d’une histoire comme rarement vue.

Comment faire avec la mort abrupte et choquante de son interprète principal Chadwick Boseman obligeant à revoir le scénario initialement prévu ? Comment gérer une actrice principale traumatisée par son accident de moto sur le tournage l’ayant envoyée plusieurs semaines à l’hôpital à cause d’une fracture de l’épaule et une commotion cérébrale ? Comment oublier le fait que son réalisateur a été arrêté par la police alors qu’il venait retirer de l’argent dans une banque où on l’a pris pour un voleur ? Sans oublier la Covid, mais ça, c’est désormais le lot du monde entier. Est-ce un film maudit ?

Avant de commencer, c’est marrant de constater à quel point les tons de Thor : Love and Thunder et Black Panther : Wakanda Forever sont diamétralement opposés. L’ultime grand écart.

Le temps du deuil

Si le film s’ouvre sur une scène hommage d’une puissance émotionnelle rare et se conclut sur une tout aussi émouvante scène mid-générique (pas de scène post-générique), ce qui passe entre les deux est loin d’être exempt de défauts. Très loin.

En fait, on sent que Ryan Coogler et Joe Robert Cole ont bricolé le scénario pour composer avec la mort de leur star. Certes, cela donne naissance à des scènes magnifiques, mais la stabilité et le rythme de l’ensemble sont brisés. Difficile d’en parler sans spoiler, donc j’y reviendrai plus bas dans la partie avec des spoilers. Toutefois, un constat, le long-métrage est beaucoup trop long pour ce qu’il a à raconter. J’ai eu la sensation qu’ils n’ont pas voulu (ou pas le temps de) sacrifier le scénario d’origine donc se sont contentés de l’ajuster en ajoutant des scènes par rapport à l’héritage de T’Challa.

Au niveau de la réalisation, comme sur le premier, ça souffle le chaud et le froid. Quand il s’agit de composer des scènes intimistes, le réalisateur Ryan Coogler fait des merveilles et livre des plans de toute beauté. Je suis encore marqué par ce sublime ralenti sur les danseuses lors de la cérémonie de l’enterrement. Mais encore une fois, quand vient l’action spectaculaire, Ryan Coogler n’y arrive toujours pas. Aucune sensation d’épique. Un alignement de simples scènes d’action convenues. Pourtant, il était efficace sur Creed.

Imperius Rex

Nouvelle star de Black Panther : Wakanda Forever, Namor était très attendu chez moi et je n’ai pas été déçu. Malgré l’absence totale d’abdominaux assez marquante pour le genre super-héroïque, Tenoch Huerta compose un antagoniste intéressant, digne de la version des comics. Difficile aussi de ne pas parler de sa monstrueuse puissance et de la superbe scène des origines, sans oublier l’origine de son nom. Bref, quand Namor se déchaîne, ça fait des vagues.

Pour l’anecdote à ressortir en soirée, Tenoch Huerta ne savait pas nager. Lorsque Ryan Coogler lui a proposé le rôle et lui a demandé ses compétences en natation, il lui a simplement répondu « Je ne me suis jamais noyé avant. ». Évidemment, il a pris des cours ensuite.

L’Atlantis maya

Par contre, j’ai été plus mitigé par Talokan (à noter qu’il s’agit d’un k, et non pas d’un c). J’ai bien aimé l’héritage de la culture maya impliquant de nouvelles origines. Par contre, la découverte de la ville m’a fait un peu le même effet que découvrir le Wakanda. Je n’ai pas été émerveillé. L’ensemble manquant, à mon goût, de personnalité. Sauf un élément central apporté par Namor à son peuple.

Toutefois, je dois préciser que la salle de cinéma dans laquelle j’étais (UGC Châtelet) avait un projecteur désastreux pour gérer le noir. On voyait du gris blanc plutôt que du noir. Du coup, les nombreuses séances nocturnes étaient un peu gâchées. Talokan en prime.

Autre déception, au final, les “Atlantes”, je ne sais pas quel est le nom des habitants de Talokan (Les Talokais ? Les Talokanais ?), sont finalement très sous-exploités. On a Namor, un peu ses bras droits, une courte visite et basta. Par contre, j’ai trouvé l’idée du changement de couleur de peau bonne.

Pour finir, un truc m’ayant bien fait rire. Les « Atlantes » se saluent entre eux en faisant un signe bien particulier rappelant le Kamé Hamé Ha de Dragon Ball. Pur hasard ou encore une hommage de Ryan Coogler après le costume de Killmonger inspiré de celui de Végéta ?

Coeur de fer

Avec Namor, une autre nouvelle venue. La remplaçante spirituelle d’Iron Man, Riri Williams alias Ironheart. Pour le coup, elle ne sort aucunement de l’ordinaire comparée aux Yelena Belova, Kate Bishop ou Kamala Khan. Surtout, je trouve que son actrice Dominique Thorne manque cruellement de personnalité. À confirmer sur sa série dédiée prévue en 2023 sur Disney+, mais pour l’instant, rien ne m’a donné envie. Encore moins son armure.

Pour le reste du casting, on retrouve ceux déjà à l’affiche du premier opus. Encore une fois, le quatuor Lupita « Nakia » Nyong’o, Danai « Okoye » Gurira, Winston « M’Baku » Duke et Angela « Ramonda » Bassett fait des étincelles. Ils font tellement des étincelles que ça devient agaçant de devoir composer pendant la grosse majorité du long-métrage avec Letitia « Shuri » Wright. Je ne vais pas vous mentir en disant que j’avais sacrément peur de ce point car je la trouvais vraiment secondaire dans Black Panther et Avengers : Infinity War. Franchement et c’est horrible à écrire mais sans la mort de Chadwick Boseman, jamais elle ne serait retrouvé en tête d’affiche. Au final, ça n’a pas manqué.

Pour terminer la critique sans spoilers, j’adresserai un regret devant l’histoire. La première partie met en place un échiquier très prometteur, mais la deuxième balaie toutes les pièces pour dérouler une intrigue basique où il y a littéralement zéro surprise jusqu’à un climax ultra convenu et sans inspiration.

Désormais, ouvrons la partie avec des spoilers, car j’en ai des choses à dire et pas que des bonnes.


Attention, à partir d’ici, il y a des spoilers, et pas des petits.

L’ombre de T’Challa

Pour moi, Wakanda Forever a deux scènes exceptionnelles m’ayant marqué par leur puissance émotionnelle. Au point de m’arracher des larmes. Celle d’ouverture et la scène mid-générique.

La cérémonie d’enterrement de T’Challa sur cette sublime musique jusqu’au logo de Marvel Studios transformé en hommage avait énormément de coeur en plus d’avoir des plans inspirés.

La scène mid-générique, parce que c’est la deuxième grosse surprise que j’ai eue du film (la première, c’est le retour de Killmonger). L’arrivée de Toussaint, alias Prince T’Challa. Le fils inattendu entre T’Challa et Nakia. Non seulement c’est magnifique de savoir que Nakia a eu un enfant avec l’amour de sa vie, mais il me donne également des motifs d’espoir pour l’avenir, car la Black Panther de Shuri, je ne peux pas.

Oui, je fais un énorme tacle à la carotide.

Le nouveau Black Panther

Shuri en Black Panther, pour moi, c’est un non. Si la voir revêtir le costume n’est pas une surprise, je ne comprends d’ailleurs pas bien l’intérêt du marketing d’avoir voulu jouer le mystère concernant l’identité du remplaçant si c’est pour qu’il y ait littéralement aucune surprise. En plus, ce sera forcément négatif car tout le monde aura son favori et, sans vouloir parler pour tout le monde, je ne pense pas que Shuri était bien placé. Le mien était Nakia. J’y ai cru pendant un moment car évidemment, il a fallu qu’elle soit là pendant la cérémonie. J’ai même croisé les doigts très forts. Mais non, Bast ne m’a pas écouté.

Autant j’avais trouvé Letitia Wright convaincante dans la partie dramatique (agréablement surpris sur ce point) où elle pleurait son frère, autant quand il s’agit de faire preuve de charisme, cela m’a semblé forcé. Elle n’en a tout simplement pas. On est à des mille lieues de T’Challa ou Killmonger. Le pire, c’est que dans le même film, Letita Wright souffre de la comparaison avec Angela Basset et le reste du quatuor. Angela Basset était époustouflante en Reine Ramonda. La séquence où elle menace les États-Unis (et la France, ce qui m’a bien fait rire) est folle de tension. La scène où elle hurle son désespoir à Okoye après l’avoir déchu de son titre de Générale m’a ému. On sent la royauté couler dans ses veines.

Favori chez certains, Killmonger revient sur un passage m’ayant surpris. Rien que sur cette scène, on peut voir l’énorme écart de charisme entre Michael B. Jordan et Letitia Wright. Je pense qu’il s’agit d’une grosse erreur de la part de Marvel Studios de capitaliser sur elle. Elle n’en a pas la carrure. J’espère me tromper, mais je ne crois pas. Heureusement, pour terminer sur une bonne note, le nouveau costume de Black Panther est magnifique.

Scénario bricolé

L’autre grosse faiblesse du film à mes yeux concerne son histoire. On voit bien qu’ils avaient un scénario de prévu avec une lutte entre Talokan et le Wakanda. Seulement, la mort de Chadwick Boseman les a forcés à revoir leurs plans. Du coup, ils ont ajouté un hommage à T’Challa tout en gérant la transition de frère vers la sœur.

Résultat, la durée du film grossit exagérément. Je peux me tromper, mais la partie consacrée à Talokan semble avoir été amoindrie. La mort de Ramonda n’a aucun impact émotionnel notable. Franchement, quel impact peut-elle avoir après qu’on ait subi celle méta de T’Challa ? Pour couronner le tout, on a un pénible soft reboot du premier épisode et Captain America : Civil War avec l’héritier assoifé de vengeance devant apprendre à devenir le dirigeant d’une nation.

C’est d’autant plus rageant que la première partie affichait de belles promesses en soumettant une grosse tension géopolitique (le discours de Ramonda, je me répète, mais wow). Cette crise montait crescendo avec une géniale attaque sur la plate-forme gérée par les américains à la recherche de vibranium. J’ai adoré le fait d’avoir introduit les “talokanais” façon film d’horreur. Surtout en s’achèvant avec l’arrivée du croque-mitaine pour détruire l’hélicoptère.

Climax décevant

Quelle déception donc, quand, dans la deuxième partie, tout rentre dans les cases bien figées du film super-héroïque avec des attaques bien sommaires. Mais bordel, où est ma gigantesque guerre entre Talokan et le Wakanda ? Où est passé la tension géopolitiuque avec le reste du monde (même si on peut noter que Namor nous fait un teasing pour la suite) ? Oui, on a l’excitante attaque de Namor contre le Wakanda couronné par le génial coup de poing de K’uk’ulkan sur M’Baku.

Mais après ça, on nous livre un final dont la tactique laisse à désirer. Ben ouais, si Shuri perd, tous ses congénères sont morts sur le bateau. Ne parlons même pas du nouveau costume d’Okoye où plus ridicule, tu meurs. C’était franchement inutile, en plus de casser la badassitude du personnage. Y a pas à péter, comme sur le premier opus, quand vient le temps de l’action, Ryan Coogler n’y arrive pas. Au final, j’ai juste apprécié le combat entre Attuma et Okoye sur le pont, comme j’avais apprécié celui entre Killmonger et T’Challa sur la falaise.

Mais, et le gars de Tolkien ?

Oh purée, avec tout ça, j’ai failli l’oublier. Bon Martin Freeman, franchement, sa partie est inutile. Il y a juste l’éclate de découvrir que son perso a été marié à Valentina de Fontaine. D’ailleurs, Julia Louis-Dreyfus, je la trouve toujours aussi géniale dans le rôle. Non seulement, son personnage déploie une intelligente et une fourberie dignes de Nick Fury, mais en plus, j’adore ses mèches violettes et j’ai kiffé quand elle regarde le ventre d’Everett Ross pour remarquer qu’il a maigri. Vivement Thunderbolts.

Par totalement dégoûté, car il l’attendait comme le meilleur de la Phase 4.

Conclusion

Je l’attendais comme le point culminant de la Phase 4. Au final, il s’agit de celui que j’ai le moins aimé et je n’en reviens toujours pas de l’écrire. Malgré un Namor génial et un émouvant hommage à Chadwick Boseman, il est pénalisé par une longuette histoire n’arrivant pas à sortir de l’ordinaire et des scènes d’action banales. À noter qu’il se pose comme l’anti-thèse de Thor : Love and Thunder.

+

  • Casting impeccable…
  • Première partie
  • Sublime hommage à Chadwick Boseman
  • Namor
  • Scène mid-générique

  • … hors Letitia Wright
  • Deuxième partie
  • Scènes d’action banales
  • Identité du nouveau Black Panther
6/10
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