Fiche
D’après le roman de Walter Isaacson | |
Titre | Steve Jobs |
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Réalisateur | Danny Boyle |
Scénariste | Aaron Sorkin |
Acteurs | Michael Fassbender, Kate Winslet, Seth Rogen, Jeff Daniels, Michael Stuhlbarg, Katherine Waterston |
Titre original | – | Date de sortie | 03 / 02 / 2016 |
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Pays | États-Unis | Budget | 30 000 000 $ |
Genre | Biopic, Drame | Durée | 2h 02 |
Dans les coulisses, quelques instants avant le lancement de trois produits emblématiques ayant ponctué la carrière de Steve Jobs, du Macintosh en 1984 à l’iMac en 1998, le film nous entraîne dans les rouages de la révolution numérique pour dresser un portrait intime de l’homme de génie qui y a tenu une place centrale. |
Critique
Steve Jobs. Tout le monde connaît la légende, mais qui connaît vraiment l’homme ? Ce n’est surtout pas le mauvais biopic Wikipédia de Joshua Michael Stern avec Ashton Kutcher (Jobs, 2013) qui a levé le mystère. J’osais espérer que le nouveau film de Danny Boyle le fasse.
Le nouveau film sur le cofondateur d’Apple est original dans sa construction. Au lieu d’être un banal biopic se contentant de suivre les plus grandes années de son sujet sans vraiment approfondir, le scénariste Aaron Sorkin a fait quelque chose de plus malin. Il a divisé son histoire en trois actes et chaque acte a lieu avant le lancement d’un produit. Ainsi, Sorkin se sert de la tension et la pression palpables avant une présentation afin de faire éclater les conflits pour nous permettre de découvrir l’homme derrière la légende. C’est une idée simple et d’une efficacité redoutable. On comprend vite où veut en venir le scénariste et j’ai été littéralement subjugué par le soin apporté sur les répliques. Toujours pertinentes, toujours utiles, on ne sombre pas dans la pompeuse outrance verbale, comme sur le dernier Tarantino. Une citation pas anodine, car comme pour Les Huit Salopards, on est proche de la configuration d’une pièce de théâtre.
Néanmoins, l’adaptation d’un tel scénario ne pourrait être réussie si elle n’était pas récitée par les bons acteurs. Et ce fut difficile. Tout d’abord, David Fincher (Aaron Sorkin avait écrit le scénario de The Social Network) était sur le projet avant de le quitter pour différents artistiques. Il voulait Christian Bale dans le rôle principal. D’autres acteurs étaient pressentis comme George Clooney et Noah Wyle. Quand Danny Boyle est arrivé sur le projet, il voulait Leonardo DiCaprio. Ce dernier, après avoir accepté, a finalement changé d’avis pour aller faire The Revenant. Dommage, car le couple phare de Titanic aurait pu être reconstitué à nouveau… La liste des acteurs s’est allongé avec Ben Affleck, Matt Damon, Bradley Coopper, Tom Cruise avant que Michael Fassbender ne soit installé dans la peau de Steve Jobs.
Découvrez Steven Paul Jobs
Personnellement, je n’étais pas vraiment convaincu par le choix de l’acteur avant le visionnage. Au final, je m’étais dit que ça ne pouvait pas être pire qu’Ashton Kutcher. Finalement, c’est tout l’inverse qui s’est produit. Michael Fassbender est, comme à son habitude, absolument épatant. Le gars a réussi à s’effacer et je ne voyais en lui que Steve Jobs. Pas Fassbender, pas Magnéto, pas David, pas Macbeth, seulement Steve Jobs, le mythe et l’homme. Son alchimie avec Kate Winslet (Joanna Hoffman) est également notable. En face des deux, des bons acteurs comme Seth Rogen (Steve Wozniak), Jeff Daniels (John Sculley) et Michael Stuhlbarg (Andy Hertzfeld). Le scénario fait en sorte que les échanges entre Steve Jobs et les autres personnages se fassent mano to mano donnant l’impression d’assister à des duels. Ces échanges duels restent systématiquement tendus du fait de la personnalité excentrique de l’homme à la pomme faisant craindre à ce que les personnages en viennent aux mains. L’image la plus marquante est Michael Fassbender menaçant Andy en mimant un pistolet avec sa main droite pour le pointer sur sa tempe. Le harcèlement moral dans toute sa splendeur.
En plus de se révéler fascinant pour le portrait au vitriol qu’il dresse de Steve Jobs, le film se montre également émouvant via le traitement de sa relation avec sa fille, Lisa, jouée par trois actrices différentes, Perla Haney-Jardine, Ripley Sobo et Makenzie Moss. Cette relation est même le cœur du récit, au-delà des considérations technologiques. C’est celle-ci qui permet de briser l’armure Steve Jobs pour découvrir Steven Paul Jobs.
Au niveau de la réalisation, du fait de la structure théâtrale de son projet, on pourrait penser que Danny Boyle soit bridé, mais c’est mal connaître le bonhomme. Encore une fois, ce dernier s’en sort merveilleusement comme cette incrustation vidéo sur un mur pour illustrer le discours de Steve Jobs à Joanna Hoffman ou encore, ma scène préférée du film : le retour en fanfare de Steve Jobs chez Apple illustrée par une vidéo dont les bandes-noires verticales de part et d’autre de l’écran réduisent la taille accordée à l’image avant de se conclure par un logo. Je ne suis pourtant pas fan (du tout, même) d’Apple, mais j’ai trouvé l’utilisation du logo magnifique.
Par Christophe Menat toujours pas fan de la marque, mais ayant plus de respect pour l’homme, le .
Conclusion
Après le mauvais biopic avec Ashton Kutcher, on pouvait s’interroger quant à la pertinence d’un nouveau projet cinématographique sur Steve Jobs. Eh bien, au lieu de filmer une bête page Wikipédia, Danny Boyle adapte un scénario très malin du scénariste de The Social Network et Le Stratège. L’histoire permet alors de découvrir Steven Paul Jobs, en grattant le mythe pour découvrir l’individu. Le tout dans une configuration théâtrale propice à des échanges verbaux aussi affûtés que des épées et livrant des passages émouvants. La recette d’un biopic ciné intéressant et pertinent. La recette d’une réussite totale.
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9/10 |