Critique : Shame

Attention film coup de poing

 
Fiche

Réalisateur Steve McQueen
Scénariste Abi Morgan, Steve McQueen
Acteurs Michael Fassbender, Carey Mulligan, James Badge Dale, Nicole Beharie
Pays Angleterre Date de sortie 7 décembre 2011
Genre Drame Durée 1h39
Budget 6 500 000 $
Le film aborde de manière très frontale la question d’une addiction sexuelle, celle de Brandon, trentenaire new-yorkais, vivant seul et travaillant beaucoup. Quand sa sœur Sissy arrive sans prévenir à New York et s’installe dans son appartement, Brandon aura de plus en plus de mal à dissimuler sa vraie vie…

Critique

Shame est une œuvre peu commune dans l’univers cinématographique. Il dispose d’un incroyable richesse que ce soit de la réalisation, de la musique, du scénario et de ses acteurs. Il arrive parfois que ces quatre fantastiques explosent au sein d’un seul et même film lui donnant un statut rarement acquis au cinéma. Shame fait partie de ceux-là.

Le héros du film est un personnage troublé sexuellement, il en a même une grande honte (d’où le titre du film, Shame). Là où on est surpris, c’est de voir que la sexualité est abordée de façon frontale. Tout est montré, ainsi on voit le pénis plutôt avantageux de l’acteur principal Fassbender. Quasiment tous les acteurs y apparaissent totalement nus au moins une fois, un procédé qui ravira l’obsédé sexuel qui sommeille en nous mais cet élément est loin d’être gratuit, très loin. On savait les acteurs plutôt frileux à s’exhiber entièrement, préférant plutôt éviter la polémique et de satisfaire la faim des journaux à scandales mais ils le sont tout de suite beaucoup moins quand ils adhèrent pleinement au discours du réalisateur (ce qui est déjà un premier bon signe).

Cette sexualité débridée toujours aux limites confère au film une aura érotique très puissante. J’ai même été surpris de voir que le film n’était interdit qu’au moins de 12 ans. Car assurément, si j’avais un enfant de treize ans, je ne sais pas si je le laisserais voir le film. D’un autre côté, ce serait dommage de lui faire passer outre de la belle leçon d’humanité ou plutôt du mal-être de cet homme peu en accord avec sa sexualité. Dans le monde où la pornographie est devenue chose banale et commune depuis l’essor de l’Internet. Le héros traîne sa carcasse ultra-sexualisée assimilant la relation sexuelle à du porno, oubliant l’essence originelle : l’union de deux amoureux.

Le sujet du film est comme vous l’avez deviné d’une grande force émotionnelle et morale mais cela ne suffit pas pour faire un film. Si Shame marque autant, il le doit grandement à la réalisation de Steve McQueen dont c’est le premier film que je vois de lui et j’ai été soufflé par la puissance presque divine de sa mise en scène. La caméra est toujours positionnée de la façon à fournir au film un cadrage éthérée sans parler de l’excellent jeu de lumière, un véritable tour de force qui explose, flirtant avec la perfection grâce à une musique absolument sublime qui permet d’appuyer chacun des plans et leur donne une certaine fascination rarement égalée au cinéma. Je vous le dis, ça m’a fait penser à du Kubrick.

Cette réalisation offre à Shame des scènes qui deviennent instantanément cultes comme ce concert de Carey Mulligan, la sœur du héros. J’ai été soufflé (oui, encore une fois) par la beauté du plan (plan rapproché sur le visage de Carey) et par la beauté des paroles. Étant sourd, rares sont les films qui sont capables de me captiver par leur musique et Shame fait partie de ceux-là, c’est une rare fois dans le monde du septième art que j’y ai accordé autant d’attention. Mais là, ce n’était pas possible de faire autrement, c’est du génie, je ne vois pas d’autre mot. Avec cette scène, j’en rajouterais une autre, celle du jogging visible dans la bande annonce.

On vient de le voir, trois des quatre fantastiques (La Réalisation, La Musique, Le Scénario) forment déjà une très belle équipe, il ne manque plus que Les Acteurs, créature schizophrène ne pouvant être pleine que si l’ensemble de ses personnalités (les acteurs) arrivent à une alchimie parfaite. Elle est de loin la plus puissante créature de l’équipe au côté de La Réalisation. Composé d’un trio d’acteurs menés par un Michael Fassbender désormais une star mondiale depuis sa prestation réussie de Magnéto dans X-Men le Commencement, elle est tout simplement sans pets de travers.

Commençons par le plus important, Michael Fassbender trouve probablement ici un de ses rôles les plus durs car il dût s’investir émotionnellement et physiquement surtout il doit se mettre complètement à nu (littéralement). Il s’en sort avec brio en composant un personnage dont il sera difficile de ne pas être captivé. A ses côtés, on comptera la magnifique Carey Mulligan, l’actrice anglaise qui monte, monte. Après Drive, c’est un nouveau chef d’œuvre qu’elle peut épingler cette année dans sa filmographie. Elle est au cœur d’une des plus belles scènes du film (ce fameux concert) et ça suffit pour qu’on en tombe amoureux en moins de deux. Les deux autres acteurs (James Badge Dale et Nicole Beharie) sont moindres mais offrent au film de beaux partenaires et servent de catalyseur aux évènements.

Conclusion

Un chef d’œuvre dont l’acquisition rarissime de l’adjectif culte ne devrait attendre que quelques années. Un véritable film coup de poing sur un sujet qui est le reflet d’un des maux de la société moderne : la pornographie ou le sexe sans amour.
+ – la réalisation
– les acteurs
– la musique
– l’histoire
– sujet et traitement tabous qui choqueront de nombreuses personnes
9/10

PS : blague lourdingue mais il faut que je la sorte. Après une scène de sexe hétérosexuelle très intense, deux gays ont quitté la salle. Dommage… parce qu’après, il y avait une belle scène homosexuelle.

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