Critique : Millenium : Les hommes qui n’aimaient pas les femmes

Un remake intéressant

Fiche

Adapté du roman Les hommes qui n’aimaient pas les femmes de la saga Millénium de Stieg Larsson
Réalisateur David Fincher (Se7en, The Social Network)
Scénariste Steven Zaillian (Le stratège)
Acteurs Daniel Craig (James Bond), Rooney Mara (The Social Network), Christopher Plummer (Priest), Stellan Skarsgard (Melancholia, Thor), Steven Berkoff (The Tourist), Robin Wright (Le Stratège), Yorick Van Wageningen (Le Nouveau monde), Joely Richardson (Anonymous)
Titre original The Girl With The Dragon Tattoo
Pays USA, Suède, UK, Allemagne Date de sortie 18 janvier 2012
Genre Crime, Drame, Mystère, Thriller Durée 2h38
Budget 100 000 000 $
Mikael Blomkvist, brillant journaliste d’investigation, est engagé par un des plus puissants industriels de Suède, Henrik Vanger, pour enquêter sur la disparition de sa nièce, Harriet, survenue des années auparavant. Vanger est convaincu qu’elle a été assassinée par un membre de sa propre famille.

Critique

Tout le monde a été surpris de voir David Fincher s’aventurer dans les étroits et dangereux sentiers du remake d’un film lui-même adapté d’un bouquin en l’occurrence le phénomène Millénium. Certes cette histoire de serial-killer avec pour trame de fond un drame à la puissance inouïe font de cette adaptation un travail sur mesure pour l’homme fasciné par les meurtriers en témoigne ses géniaux Se7en et Zodiac. Et puis le remake du film lui-même adapté d’un bouquin Laisse-moi entrer (Morse) était plutôt efficace.

La première surprise concernant le film concerne son budget de 100 000 000 $, on se laisse alors voguer à des hypothèses les plus farfelues car rien dans l’histoire ne justifiait réellement ce tarif monstrueux. Le prix de l’achat des droits est-elle à inclure dans ce budget ? Si tel était le cas alors on comprendrait mieux car après visionnage, le film paraît en avoir coûté la moitié mais peut-être que les envolées de la réalisation de David Fincher ont un coût…

En effet ce dernier multiplie les mouvements de caméra presque surréalistes.

Spoiler

Par exemple, ce plan où la caméra débute sur le dos de Lisbeth avant de faire un travelling avant, de surmonter le long du dos histoire de bien découvrir le tatouage de dragon (titre original du film) et de basculer le long de la tête afin de se retrouver à l’envers sur un gros plan sur Lisbeth. Nul doute qu’un tel plan d’une telle virtuosité a un coût élevé.

Avec Millénium, on voit un peu l’aboutissement de la maîtrise de la caméra de David Fincher qu’on avait pu découvrir dans ces précédents films surtout Fight Club et Panic Room. En plus de cela, on peut aussi adjoindre un générique instantanément culte dont la vision cauchemardesque et absolument splendide vous hantera longtemps après la fin du long-métrage. Toutefois cette séquence n’est pas à adjoindre à Fincher mais à Tim Miller (normalment, il va réaliser l’adaptation très attendue de Deadpool, le mercenaire schizophrène). Elle représente l’apothéose du cauchemar de Lisbeth. Pour ceux n’ayant pas spécialement envie de voir le film, vous pouvez voir cette séquence à la fin de l’article. Je vous conseille de mettre l’image en HD et de bien monter le son. Pour les autres, gardez la surprise. En tout cas, au niveau de la réalisation, le nouveau film de David Fincher est un sans-faute.

Autre faits marquants, la musique et le son sont absolument envoûtants. Le réalisateur joue à merveille en positionnant avec parcimonie et toujours avec exactitude les artifices sonores. Surtout ils permettent de renforcer les sentiments de détresse et de cauchemar éveillé visible à certains moments du film. Un excellent travail.

Passons à présent sur les côtés négatifs du film. Le film est presque parfait seulement on ne pourra faire l’impasse sur la discussion sur l’intérêt d’un tel remake hormis pour les américains nombrilistes. Car je vais vous le dire franchement, je vois mal son intérêt pour ceux ayant lu le livre ou vu l’autre film (je fais partie de cette deuxième catégorie). En effet, Millénium est une histoire reposant en grosse partie sur l’enquête sur la disparition d’Harriet et quand on connaît la fin, ça gâche une grosse partie du jeu. Et on a l’impression que David Fincher l’a compris en minimisant l’enquête par rapport aux désastreuses aventures de l’orpheline Salander.

C’est simple, l’enquête est évidente à deviner, …

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…le coupable est joué par un acteur connu et est montré en permanence tout en nous rabâchant que le coupable est un membre de la famille Vanger. Le seul qui nous est agité sous nos yeux est celui joué par cet acteur connu, Martin, les autres membres n’étant que de seconds rôles obscurs.

Par contre, ce qui l’est moins, ce sont les motivations du/ criminel et en cela, la découverte sera toujours un choc.

Aussi la révélation finale est amplement discutable.

Spoiler

Je parle bien de la découverte : Anita est en fait Harriet… En effet dans l’original, Harriet était retrouvée grâce à la mise sur écoute d’Anita or ici, Harriet a pris l’identité d’Anita. Se pose un problème majeur du fait comment est-ce possible que le héros ne l’ait pas reconnu à partir des photos surtout étant donné qu’il est journaliste, c’est son métier et les photos, il les a vu des millions de fois. Encore plus si on considère le fait qu’il arrive à reconnaître Martin à partir de photos flous. Nous, les spectateurs, c’est normal qu’on ne reconnaisse pas Harriet vu qu’ils ont pris deux actrices différentes pour incarner la version jeune et la version adulte : les salauds ! Brouillez les pistes de façon aussi artificielles.

Une note qui fait sacrément tâche et surtout qui ne sert pas à grand chose. Faudra m’expliquer l’intérêt.

Autre fait typiquement américain qui amoindri un peu la puissance du film concerne la fameuse scène du viol.

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Dans le film original, c’était un moment tout simplement insoutenable surtout via sa longueur. Elle est transformée dans cette nouvelle version en scène soft et courte dont la capacité à traumatiser le spectateur est largement amoindrie à cause d’artifices employés pour masquer l’horreur de cette scène.

Dans des termes général, l’ensemble est beaucoup moins violent et malsain.

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Par exemple, la torture finale du personnage principal dans l’antre de Martin est tranquille et se résume à un déshabillage accompagné d’un sac en plastique sur la tête.

Au niveau de la prestation des acteurs, je trouve que le choix de Daniel Craig nuit un peu à la crédibilité du personnage car il incarne aux yeux du monde James Bond. Du coup quand il incarne un personnage qui demande un minimum de fêlures physiques, l’ensemble passe beaucoup moins bien. On a bien plus du mal à comprendre que son personnage ne soit pas capable de résister physiquement (on ne peut pas s’empêcher de lui dire « Mais putain, mets-lui une droite bordel!« ). Toutefois dans l’ensemble, il tient parfaitement la route.

Mais la grande question tournait autour de Lisbeth, le personnage culte de la saga. Si je devais choisir, je prendrais la Lisbeth originelle jouée par Noomi Rapace mais la nouvelle n’a pas grand chose à lui envier sinon qu’elle demeure un peu trop fragile pour qu’on assimile facilement son côté destructeur. Ce problème du fait de son visage presque démoniaque, Noomi Rapace ne l’avait pas alors que Rooney Mara dispose d’un visage trop juvénile donc angélique. On était bien plus terrifié et envoûtée par Noomi que Rooney Mara. Malgré tout, la jeune actrice s’en sort bien, bien aidée par des costumes magnifiques. On va dire que les deux se complètent et permettent d’offrir deux visions opposés sur Lisbeth Salander, l’une incarnant une Lisbeth démoniaque et l’autre, une angélique.

Conclusion

Au final, Millenium : Les hommes qui n’aimaient pas les femmes succombe aux problèmes inhérents aux remakes américains à savoir une version légèrement plus édulcorée pour mieux passer sur la scène internationale surtout en minimisant la fameuse scène du viol (la vengeance est plus mise en avant) et un changement de script qui malheureusement n’a pas sa place car très incohérente (voir le final). Malgré tout, les longueurs se font rarement sentir ce qui est un tour de force en soi (2h38 quand même) et le fait que je connaissaissais d’avance le déroulement ne m’a pas empêché de suivre cette histoire avec intérêt. Il faut avouer que la réalisation magistrale de David Fincher y est pour beaucoup. Pour ceux n’ayant pas lu le livre ou vu le précédent film, vous pouvez aisément ajouter un point à la note.
+ – Réalisation au sommet
– Rooney Mara incarne une Lisbeth différente de l’autre version donc intéressante
– Générique culte
– Moins violent, moins malsain
– Twist final foiré
– Enquête presque au second plan
PS : à choisir, je vous orienterais vers la série qui a inspiré les premiers films pour ressentir cette ambiance malsaine et une violence plus hard mais pour ceux qui ne veulent pas être dégoûté ou traumatisé, ce remake américain vous conviendra mieux.Au jeu des points forts entre les deux versions, la version de David Fincher remporte avec brio celle de la réalisation mais les acteurs sont meilleurs dans l’autre version.
7/10
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