Une formidable adaptation, même si moins traumatisante
Fiche
Titre | Marche ou crève | Titre VO | The Long Walk |
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Réalisateur | Francis Lawrence | Scénariste | JT Mollner |
Acteurs | Cooper Hoffman, David Jonsson, Garrett Wareing, Tut Nyuot, Charlie Plummer, Ben Wang, Roman Griffin Davis, Jordan Gonzalez, Josh Hamilton, Judy Greer, Mark Hamill | ||
Date de sortie | 01 / 10 / 2025 | Durée | 1h 47 |
Genre | Thriller | Budget | 20 000 000 $ |
Le jeune Garraty va concourir pour « La Longue Marche », une compétition qui compte cent participants. Cet événement sera retransmis à la télévision, suivi par des milliers de personnes. Mais ce n’est pas une marche comme les autres, plutôt un jeu sans foi ni loi…
Critique
2025 est clairement l’année Stephen King. Après The Monkey et Life of Chuck, voici une troisième adaptation d’un de ses romans, en attendant la quatrième le mois prochain : Running Man. Toutefois, Marche ou crève a une place particulière dans mon cœur, puisqu’il fait partie de mon top 3 des œuvres de Stephen King avec Ça et La Tour Sombre.
Une marche à deux générations
Petite anecdote personnelle : durant mon adolescence, je ne lisais pratiquement que Stephen King. J’avais une trentaine de ses romans dans ma bibliothèque. Un jour, mon père — qui n’avait jamais lu l’auteur, mais intrigué par la passion de son fils — m’a demandé si j’avais un roman à lui conseiller. Bon, Ça avec ses trois tomes, et La Tour Sombre, n’en parlons même pas… Je me suis dit que ça allait être compliqué. Mais Marche ou crève (1979) avec ses 379 pages, c’était l’idéal pour débuter.
Il avait adoré. Des années plus tard, il m’en parle encore, et je ne cache pas que j’avais une petite fierté à l’époque de partager ma passion pour King. Cette semaine, des décennies après, c’était l’occasion parfaite pour une réunion père-fils au cinéma, afin de découvrir ensemble l’adaptation de Marche ou crève.
Une adaptation qui aura mis longtemps à se concrétiser, puisque dès 1988, le légendaire George A. Romero (La Nuit des morts-vivants, Zombie) était déjà attaché au projet. Mais cela n’a rien donné — tout comme en 2007 avec Frank Darabont (qui avait déjà signé des adaptations du King avec Les Évadés, La Ligne verte et The Mist), puis en 2019 avec André Øvredal (The Troll Hunter, The Jane Doe Identity). Il faut dire que malgré un pitch fort, Marche ou crève est surtout une aventure psychologique difficile à retranscrire à l’écran, tant elle plonge progressivement dans la folie.
L’enfer est pavé de pas humains
Et je le dis tout de suite : ce point n’est pas vraiment palpable dans cette adaptation signée Francis Lawrence (déjà à l’aise dans ce registre après quatre Hunger Games). Cela se ressent notamment dans la fin, bien moins traumatisante que celle du roman.
Francis Lawrence préfère étirer une narration plus classique, où l’on suit un groupe de jeunes acteurs dont les tourments psychologiques sont forcément joués. L’impact en souffre forcément, surtout du côté des deux acteurs principaux (Cooper Hoffman et David Jonsson), chez qui on ne ressent pas vraiment le poids psychologique de la marche. À l’inverse, d’autres brillent : Ben Wang (oui, le nouveau Karaté Kid), Charlie Plummer et Tut Nyuot livrent des performances bien plus marquantes.
Là où le film prend vraiment son envol, c’est dans le portrait de ces jeunes garçons. C’est là toute la magie de Stephen King : dresser des personnages qu’on n’oublie pas. Au fil des dialogues, on apprend à les connaître, à s’y attacher, si bien que chaque mort est un uppercut au cœur. Et contrairement à Hunger Games, Francis Lawrence ne ménage pas la violence. Sans jamais verser dans le grand-guignolesque, chaque mort tombe comme un couperet.
Stand by Me
Même en connaissant déjà le roman, je ne pouvais m’empêcher de frissonner à chaque avertissement donné.
On notera aussi la présence glaçante du Commandant, figure militaire envoyant des adolescents à la mort sans compassion — rappelons que Stephen King a écrit ce roman entre 1966 et 1967, alors qu’il était étudiant et que la guerre du Vietnam battait son plein. Le rôle est incarné par un Mark Hamill méconnaissable, terrifiant de froideur, accompagné d’une Judy Greer au cœur de moments d’émotion intense.
Quelques lignes plus haut, j’ai critiqué la prestation de Cooper Hoffman et David Jonsson, mais c’est le seul vrai reproche que j’ai à faire tant le reste de leur jeu fonctionne à merveille. Mention spéciale à David Jonsson, solaire et charismatique, que j’avais déjà remarqué dans Alien : Romulus dans un rôle totalement différent.
Autre réussite majeure : le rythme. Malgré un contexte psychologique lourd et un cadre quasi unique (la route, encore et toujours), l’ennui ne pointe jamais le bout de son nez.
⚠️ Partie avec spoilers sur la fin
Dans le roman, on retrouve le même trio vers la fin : Garraty, McVries et Stebbins. Seulement, l’ordre change : c’est d’abord McVries qui meurt, terrassé par l’épuisement en s’asseyant. Puis, alors que Garraty est sur le point d’abandonner, Stebbins s’effondre à son tour. Garraty croit alors voir une ombre (Randall Flagg, c’est toi, petit bâtard ?) devant lui, lui faisant signe. Il continue à marcher vers elle. Une fin absolument nihiliste.
Dans le film, les changements sont beaucoup plus “hollywoodiens”, cherchant à offrir davantage de satisfaction au spectateur. Perso, je ne suis pas fan — j’adore les fins nihilistes — mais ça fonctionne.
Par Christophe Menat pressé de boucler l’année King avec Running Man.
Conclusion
Francis Lawrence livre un film solide, dur, sans concession, même s’il n’arrive pas à retranscrire totalement la folie et le désespoir du roman de Stephen King. Malgré quelques choix « grand public », l’émotion est bien là, les personnages sont attachants, et la tension, comme le rythme, ne retombe jamais. Un film qui, avec ses formidables acteurs, marche droit au cœur. |
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8/10 |