Critique : Joker : Folie à deux

L’homme qui rêve en comédies musicales

Fiche

Titre Joker : Folie à deux Titre VO
Réalisateur Todd Phillips Scénaristes Scott Silver & Todd Phillips
Acteurs Joaquin Phoenix, Lady Gaga, Brendan Gleeson, Catherine Keener, Zazie Beetz, Steve Coogan, Harry Lawtey, Leigh Gill, Ken Leung
Date de sortie02 / 10 / 2024 Durée2h 18
GenreDrame, Musical, Policier, Thriller Budget200 000 000 $

Suite du film « Joker » de 2019.

Critique

Encore à ce jour, je suis épaté par le succès de Joker (2019) que je n’avais que modérément apprécié, notamment à cause de cette désagréable sensation d’avoir vu une Valse des pantins (1983) de Martin Scorsese avec un soupçon de Taxi Driver (1976), toujours de Scorsese, enrobé d’un skin Joker. Bref, il y avait beaucoup (trop ?) de Scorsese dans Joker. Point étonnant quand on sait qu’il avait envisagé un temps de le réaliser. D’ailleurs, Joker : Folie à deux semble lui faire un petit clin d’œil via le personnage du juge.

Bref, pour moi, Joker était un bon film, mais il manquait cruellement d’originalité en plus de briser le mythe du Joker en faisant de lui un personnage pathétique, se retrouvant malgré lui au sein du chaos. Néanmoins, j’étais tout de même curieux concernant cette suite en raison de son aspect « comédie musicale » (voilà, une vraie prise de risque) et surtout de son statut de séquelle l’empêchant de recycler un film de Martin Scorsese.

What a world, what a life, I’m in love

Commençons déjà par le point fort (pas de pluriel, non) pour moi. La photographie est toujours aussi sublime. Certains plans sont d’une beauté saisissante. Pas étonnant, vu que le directeur de la photographie du premier, Lawrence Sher, est revenu. De plus, le budget a explosé, passant de 60 millions à 200 millions, même s’il faut compter les salaires de Joaquin Phoenix et de Lady Gaga dans le lot. Au passage, les deux acteurs sont bons.

Quant à l’aspect comédie musicale, c’est une semi-réussite. Certaines séquences sont assez saisissantes. Ma préférence va pour The Joker, une chanson de Leslie Bricusse et Anthony Newley sortie en 1964 (la majorité des chansons datent de cette période ou d’avant : Frank Sinatra, Dean Martin, Joey Bishop, Peter Lawford, Angie Dickinson et Sammy Davis Jr.), chantée par Joaquin Phoenix. Mais il y a surtout trop de chansons, ce qui alourdit le rythme déjà pas bien maîtrisé.

À noter que ces séquences musicales proviennent des fantasmes d’Arthur Fleck. Comprenez par là qu’elles lui permettent de se plonger dans un monde imaginaire façon comédie musicale avec une touche d’humour noir. Elles restent donc imaginaires. On n’est donc pas devant une comédie musicale à proprement parler. Un point permettant de garder du réalisme.

Le procès de Joker

Néanmoins, là où le film déçoit le plus, c’est au niveau de son histoire. On sent qu’ils n’ont pas grand-chose à raconter. Étant donné que le duo de scénaristes ne peut pas « repomper » (je suis méchant, mais difficile de dire les choses autrement) un film de Scorsese, il doit inventer une histoire. Sur une logique de faire du fric en plus, même si le pitch provient d’un rêve de Joaquin Phoenix sur le tournage du premier Joker.

Dès lors, on se retrouve avec un mélange entre une love story et une histoire de procès dont le rythme est beaucoup trop haché pour être passionnant, malgré de bonnes idées comme l’exploration de la dualité entre Arthur Fleck et le Joker (thème mis sur la table avec une étonnante et nostalgique scène d’ouverture) dont la conclusion risque de heurter certains fans du premier.

Mais bon, il faut en parler sous couvert de divulgâcheur.

The Dark Knight

Attention, partie contenant des spoilers (cliquer ici pour lire)

Vers la fin du procès, Arthur Fleck indique clairement qu’il n’y a pas de Joker. Seulement lui. Il assume la responsabilité de ses actes. Il n’y a donc pas de figure du mal, seulement les actes d’un déséquilibré qui a profité d’un « heureux » concours de circonstances pour devenir une icône. D’ailleurs, rebelote par la suite, où une explosion lui permet de s’échapper. Décidément, il a le cul bordé de nouilles, ce Arthur.

La fin offre deux « easter eggs » malvenus. Le premier est Harvey Dent qui a son fameux visage à moitié défiguré. Mais quel intérêt ? Un peu comme la famille Wayne dans le premier.

Le second semble être un clin d’œil au Joker d’Heath Ledger via le personnage de Connor Storrie. Après avoir poignardé Arthur, il se grave un sourire. Difficile alors de ne pas penser aux cicatrices du Joker de The Dark Knight (2008). Quoi qu’il en soit, l’idée n’est pas mauvaise même si elle ne sert à rien, car ce Joker n’a rien à voir avec la trilogie de Nolan. Ce que je lui reproche, c’est de casser la sortie de Joaquin Phoenix dans le rôle dans le sens où je regardais plus ce qui se passait avec l’autre « Joker » plutôt qu’Arthur. Du coup, j’ai pris sa mort de façon déconnectée. Pas aidé par le côté prévisible de cette fin vu les nombreux appuis sur Storrie.

Je note également que le sort réservé à Sophie Dumond a été révélé, elle est bel et bien vivante.

Par regrettant que la recette n’ait pas réussi à prendre.

Conclusion

Joker : Folie à deux est une suite prenant bien plus de risques que son prédécesseur qui se contentait d’appliquer un joli (merci au directeur de la photographie) skin Joker sur La Valse des Pantins (1983) de Martin Scorsese. Notamment en invoquant les comédies musicales des années 60. J’étais ravi de cette prise de risque, mais malheureusement au final, on se retrouve devant un pantin désarticulé plombé par une durée trop longue, une histoire ne sachant pas trop où aller (on sent trop les origines mercantiles), des easter eggs malvenus et une love story à laquelle je n’y ai jamais cru.

+

  • Photographie toujours aussi sublime
  • Vraie prise de risque
  • Séquence sur The Joker de Leslie Bricusse et Anthony Newley

  • Rythme mal maîtrisé
  • Histoire n’ayant pas grand-chose à raconter
  • Easter eggs malvenus
5/10
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