Le monde a changé. Les règles ont changé.
Fiche
Titre | Falcon et le Soldat de l’Hiver | Titre VO | The Falcon and the Winter Soldier |
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Créateur | Malcolm Spellman | Réalisateur | Kari Skogland |
Acteurs | Anthony Mackie, Sebastian Stan, Daniel Brühl, Emily VanCamp, Wyatt Russell, Erin Kellyman | ||
Saison | 1 | Épisode | 4 |
Date de sortie | 09 / 04 / 2021 | Durée | 54 mn |
Genre | Action, Aventure, Drame, Science fiction | Chaîne | Disney+ |
John Walker perd patience avec Sam et Bucky, qui en apprennent davantage sur Karli Morgenthau. |
Critique
Dans les mini-séries, il y a généralement un épisode où la donne change. Où ce qui était une bonne série jusque-là passe à l’échelle supérieure. Si ça arrive… Heureusement, pour Falcon et le Soldat de l’Hiver, ce sera le cas. Avec l’épisode 4, Le monde nous regarde.
Envie. Rouillé. Dix-sept.
Jusqu’ici, j’appréciais la série, mais je trouvais qu’elle avait du mal à passer un cap. Il manquait ce petit truc pour la faire décoller. Je l’ai eu aujourd’hui. Dès l’ouverture. Au Wakanda. Avec cette séquence où Ayo teste si le conditionnement du Soldat de l’Hiver est toujours fonctionnel. Ce plan sur le visage de Sebastian Stan au rythme des mots-clés. Un moment puissant et… émouvant quand les larmes de l’ancien Soldat de l’Hiver coulent. J’ai pris un pied monstrueux. À ce moment-là, j’ai su que les choses allaient devenir sérieuses et la suite ne m’a pas démenti.
On revient avec ce sublime trio : Sam, Bucky et Zemo. De la série, j’attendais beaucoup du duo, mais j’ai été sincèrement charmé par ce trio inattendu. Leurs échanges sont vraiment fun. Daniel Brühl est un véritable régal dans ce rôle. Néanmoins, il reste Zemo. On ne peut pas lui faire confiance. On a envie, car il est fun, mais non. Cet épisode est l’occasion de découvrir le talent pour la manipulation du Baron (sa comptine, d’une beauté macabre). Alors que Bucky et Sam se cassent les dents durant leur enquête. Zemo y parvient sans trop de mal. Un exemple concret de comment diable ce simple humain a-t-il pu réussir à diviser les Avengers.
Réflexion sur le mythe du super-soldat
Surtout, cet épisode est l’occasion d’enrichir le personnage de Karli Morgenthau. Je l’appréciais, mais il fallait qu’elle soit approfondie. C’est désormais chose faite. C’est finement écrit. Principalement via ce dialogue avec Sam, le tout avec les échos des paroles d’Helmut Zemo concernant les super-soldats en fond. Chose amusante : s’il critique tous les surhumaines, il met Steve Rogers dans une catégorie à part. Un petit détail pouvant sembler anodin, mais bourdonnant dans ma tête au vu des agissements de John Walker.
Ceux qui connaissent les comics savent que John Walker est un personnage intéressant. En effet, il se distingue de Steve Rogers en étant plus humain. Steve Rogers était parfait. La bannière vivante. Une idée de l’Amérique pure avec toutes ses qualités, mais sans aucun de ses défauts. Il ne peut y avoir deux Steve Rogers. Il est l’anomalie. John Walker est la norme. Non seulement, il doit prendre la suite d’une légende, mais en plus, il souffre de vrais maux. On le sent traumatisé par la guerre, cf. l’échange avec son coéquipier Lemar Hoskins. Il est colérique, impatient et stressé. Des défauts si communs. On lui a légué un fardeau beaucoup trop lourd. Surtout dans un monde où tant lui sont supérieurs. Steve Rogers n’était peut-être pas le plus puissant, ni le plus intelligent, mais il avait du cœur et un courage défiant toute logique.
Comme disait le docteur Abraham Erskine à un frêle Steve, la veille de sa transformation :
Le sérum accentue tous les traits de caractère. Le bien devient excellent. Le mal devient monstrueux. Voilà pourquoi on vous a choisi. L’homme dôté d’une grande force depuis sa naissance peut cesser de la respecter. Alors qu’un homme faible connaît la valeur de la force, et est capable de compassion. […] Quoiqu’il arrive demain, promettez-moi une chose. Restez vous-même. Ne soyez pas un soldat exemplaire, mais un type bien.
Dr. Abraham Erskine
Le Captain America humain
Or, John Walker est un soldat exemplaire. Il n’est pas totalement bon, ni totalement mauvais. Il est terriblement humain. Devant son horrible geste à la fin de l’épisode, on ne peut lui en vouloir totalement. Son geste est compréhensible. Il est un homme de et en guerre. Désormais, avide de vengeance. Il a perdu son ancre. La suite promet d’être diablement excitant, car non seulement, il est un surhomme, mais il est également brisé. Un surhomme brisé…
Quant à Karli Morgenthau, elle doit désormais bien regretter son geste. Son visage durant la scène finale nous fait comprendre qu’elle a compris avoir lancé une guerre. Jusqu’ici, elle avait dominé le jeu. Son ego avait sacrément gonflé. Sauf que quelqu’un vient de prendre une aiguille et piquer dans son ego. Plus de sérums, un super-soldat et un baron du crime sont à ses trousses et le nombre d’alliés diminue.
Quand l’horreur prend vie
Au-delà de cette réflexion que je trouve toujours aussi passionnante concernant le mythe du surhomme, cet épisode est également une jolie petite réussite dans la mise en scène. Il y avait un côté Homeland pas désagréable du tout entre espionnage, stress et camps multiples entre ennemis à l’extérieur et à l’intérieur. J’ai bien senti la tension monter au fil des épisodes jusqu’au firmament où Walker recherche son partenaire Battlestar. Le voir déambuler seul dans des couloirs rappelant ceux des films d’horreur, le tout avec des ennemis l’attaquant comme s’ils étaient des esprits éthérés. On était à deux doigts du slasher. J’ai trouvé ça super bien foutu, car le nouveau Captain America a alors réagi comme on l’aurait tous fait à ce moment-là. Il a pris le sérum.
J’aime beaucoup le personnage de John Walker. Wyatt Russell fait un excellent travail. Je me répète, mais je trouve que c’est important de le dire vu tout ce qu’il prend dans la gueule en ce moment. Il offre une autre vision du mythe de Captain America. Un Captain America plus humain, plus proche de l’Amérique. Si Steve incarnait les idéaux de l’Amérique, John incarne la véritable Amérique. Une Amérique avec du sang sur les mains. Le plan suivant demeure alors d’une perfection symbolique.
La nouvelle géopolitique
Un des éléments les plus intéressants de cet épisode concerne également la situation politique à l’échelle planétaire. On apprend que le monde avait alors aboli les frontières. Chacun était donc libre de se déplacer où il voulait. En effet, devant la disparition de la moitié de la population mondiale, les pays devaient alors combler des manques. Cela se traduit donc par la possibilité d’emploi partout. Surtout, il n’est plus question de rester chacun dans son coin. Il faut travailler ensemble afin de surmonter cette crise unique.
Le problème, c’est le retour des disparus. Des pays se retrouvent alors avec un trop-plein de population. La priorité est faite aux revenus, car légitimes. Une situation politique faisant écho à ce qu’on a vécu au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Quand il a fallu reconstruire la France, des millions de travailleurs étrangers ont été accueillis dans des logements provisoires, des HLM construits à la va-vite. Sauf qu’un moment, leurs aides n’étaient plus nécessaires. Dès lors, ils se sont retrouvé non désirés dans des logements insalubres, car pas prévus pour durer. Bref, le monde d’après Avengers: Endgame est loin d’être idéal. Fascinant.
Impossible de finir sans une mention spéciale aux Dora Milaje toujours stylées, avec en prime un joli combat et une Ayo humiliant le Loup Blanc (excellente idée, c’était logique en soi). De cet épisode, je regrette des effets spéciaux moins réussis que d’accoutumée. Il y a une doublure numérique dégueulasse quand Bucky saute d’un immeuble avant de sprinter pour rejoindre John Walker.
Par Christophe Menat ravi de voir la série monter d’un cran.
Conclusion
Sans aucun doute, le meilleur épisode de la série jusqu’ici. Moins porté sur l’action que d’habitude, Le monde nous regarde prend le temps d’étoffer Karli Morgenthau et John Walker. Le tout avec une tension ne cessant de grimper jusqu’à un final mémorable. |
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9/10 |