Critique : Birdman

Ni super-héros, ni super-zéro

Fiche

Titre Birdman
Réalisateur Alejandro González Iñárritu
Scénaristes Alejandro González Iñárritu, Nicolás Giacobone, Alexander Dinelaris, Armando Bo
Acteurs Michael Keaton, Emma Stone, Zach Galifianakis, Naomi Watts, Andrea Riseborough, Edward Norton, Amy Ryan, Lindsay Duncan, Merritt Wever
Titre original Date de sortie 25 / 02 / 2015
Pays États-Unis Budget 18 000 000 $
Genre Comédie, Drame Durée 1h 59

À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego… S’il s’en sort, le rideau a une chance de s’ouvrir…

Photo de Birdman
« Ah toi aussi, tu es un has-been. Ben, viens mon gars, j’ai un film à te proposer. »

Critique

En parlant d’Alejandro González Iñárritu, je ne dirais pas qu’il est un de mes réalisateurs préférés ou même que je le follow activement, parce que bon, les deux films que j’ai vu de lui sont 21 Grammes et Babel et ils sont loin de m’avoir enthousiasmé. Même si, Babel m’a bien fait marrer avec l’histoire de la sourde asiatique qui découvre sa sexualité. Pourtant, difficile de faire l’impasse sur Birdman, parce que d’un, il aborde un sujet qui touche les comic movies (ma passion absolue), et que de deux, il a une moyenne très élevée.

Birdman raconte l’histoire de Riggan Thomson, une ancienne gloire d’Hollywood qui a accédé au firmament grâce au rôle de Birdman, avant de retomber dans l’anonymat. Comment ne pas faire la parallèle avec son interprète, Michael Keaton, qui a été le premier à incarner Batman au cinéma avant de disparaître des radars hollywoodiens pendant de très longues années ? Toutefois, il ne s’agit aucunement d’un récit autobiographique (Michael Keaton a bien insisté dessus durant la promotion américaine). Néanmoins, ça apporte au projet un petit cachet non-négligeable. Le début met même le paquet dessus. Malgré tout, le sujet n’est que brièvement abordé, le récit tournant davantage autour de la volonté de laisser son empreinte sur l’Histoire avant de mourir (très bien expliqué en utilisant un autre Batman, George Clooney). Un thème qui nous touche tous (peut-être plus en vieillissant). Après tout, nous ne vivons que des vies éphémères condamnées à être oubliées. Pour Riggan, cet héritage prend la forme d’une pièce de théâtre qu’il met en scène et où il incarne le rôle principal. L’occasion parfaite de prouver au monde entier qu’il n’est pas que Birdman, mais aussi un grand acteur.

Birdman, le Batman d’avant le Dark Knight

Dès lors, le long-métrage nous raconte l’envers de décor d’un théâtre de Broadway. Une plongée en apnée fascinante. La caméra nous balade sans s’arrêter (le film, sauf la fin, est construit comme un seul et unique plan séquence, même si dans les faits, ce n’est pas le cas, les points de raccord sont si subtils qu’on peut le considérer comme tel) dans un univers peuplé de comédiens talentueux (admirez un peu la liste dans la fiche du film). Parmi les plus marquants, on peut compter sur un Zach Galifianakis méconnaissable (il s’agit du seul personnage à être « normal », ce qui est hallucinant venant de Zach) et une Emma Stone époustouflante. Cette dernière bouffe carrément Edward Norton avec les doigts sur une scène commune, alors que jusque-là, c’était ce dernier, la star du film, Michael Keaton étant plutôt discret. Discret, mais pas pour longtemps. Dans la deuxième partie du film, il explose littéralement au point de mettre tous les autres acteurs au rabais et ça commence avec un combat bien dans les règles contre un Edward Norton en culotte tue-l’amour. Le truc que j’ai vraiment adoré avec Michael Keaton, ce sont ses scènes avec son surmoi (la petite voix de ton esprit qui n’arrête pas de te faire chier à te dire ce qu’il faut faire), car ce dernier prend la voix de Birdman, très proche de celui de Batman. Ça fait vraiment cool.

Après, bon, j’ai été un peu déçu de voir que finalement le côté « super-héroïque » de la chose n’était exploité que pour illustrer la dualité du personnage. D’un côté, c’est une gloire pour avoir incarné Birdman, il est donc une icône d’Hollywood. De l’autre, il veut prouver qu’il est un « vrai » acteur, celui-là même qui foule les planches pour se confronter au public. Le réalisateur (je ne réécris pas son nom, il est trop chiant à écrire) offre une jolie réflexion sur ce thème, et surtout, ô miracle, ne prend pas parti-pris, se contenant de présenter deux univers complètement différents. Pour le côté fun, il offre une séquence super-héroïque à la fin du film (les gars du marketing ont dû hurler de bonheur en découvrant les images), mais c’est assez moche.

La folie des acteurs

Après si on considère le film d’un point de vue artistique (en mettant de côté, la déception du fait que les éléments super-héroïques sont pratiquement là juste pour faire cool), c’est un bon film, mais certainement pas de quoi s’enthousiasmer. C’est bien joué et bien filmé. Le sujet est plutôt intéressant, mais finit par devenir redondant à la fin. Surtout, ça s’éparpille un peu trop et on perd parfois en cohérence. Personnellement, le film ne m’a jamais touché. Je me suis simplement contenté de me laisser mener par la caméra pour découvrir une bande d’allumés (on aurait transposé l’action dans un asile de fous qu’on aurait rien trouvé à redire). C’est sympa, mais de là, à crier au chef-d’œuvre ? Pas pour moi. Puis au final, ça donne une fin frustrante, car j’ai eu la sensation que le film est passé à côté de quelque chose.

D’ailleurs en parlant de fin. À la base, elle aurait dû être tout autre. On en parle sous couvert de balise spoiler.

Spoiler : la fin originelle

L’autre fin commence avec Michael Keaton qui se tire dessus, puis la caméra se tourne vers le public qui applaudit (jusque-là, c’est comme dans la fin originale). Ensuite, la caméra se retourne vers la scène où on découvre James Lipton ou Charlie Rose en train de lire une critique. Michael Keaton est à côté de lui. James Lipton (ou Charlie Rose) est emballé par la critique de la pièce et Keaton jubile. Puis la caméra quitte la scène pour aller se balader dans les couloirs du théâtre comme à son habitude avant d’arriver dans une salle où on voit Johnny Depp assis devant le miroir avec une affiche de Pirates des Caraïbes 5 dans son dos. C’est à ce moment-là qu’on entend la voix de Jack Sparrow qui charrie Johnny Depp, exactement de la même manière que celle de Birdman se moquait de Riggan, : « What the fuck are we doing here, mate? ». Johnny Depp succède à Michael Keaton, et on recommence.

Ça aurait été vraiment génial comme fin, car elle colle parfaitement avec le ton satirique du film.

Par Christophe Menat, le , aie, aie.

Photo du film Birdman réalisé par Alejandro González Iñárritu avec Michael Keaton
« C’est relou les fans, celui-là me suit depuis le début du film. Satanés cosplays. Comment vais-je pouvoir choper de la minette avec ça dans le dos ? »

Conclusion

Birdman pose une jolie réflexion sur la volonté de laisser une trace de sa vie sur le monde et sur l’Histoire. Un rêve que chaque individu a expérimenté. Sauf que Riggan fait partie de ces rares individus à en être obsédé. Il en résulte un long-métrage dynamique, autant au niveau de la réalisation que des acteurs et par sa volonté de montrer l’envers du décor d’un théâtre de Broadway, mais plombé par quelques redondances, notamment sur sa fin. Au final, un film assez inoffensif et un côté super-héroïque peu exploité (sinon par les gars du marketing 😛 ).

+

  • Michael Keaton et Emma Stone
  • Réalisation subjuguante
  • Les coulisses d’un théâtre de Broadway

  • Une réflexion intéressante, mais brouillonne
  • Un climax bof
7/10
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